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CASSE-NOISETTE ET LES QUATRE ROYAUMES

De somptueux décors et costumes pour une fable peu digeste sur le deuil

Après la mort de sa mère, la jeune Clara reçoit de celle-ci un étrange œuf de métal qu’elle ne peut ouvrir puisqu’elle n’en possède pas la clé. Forcée par son père de faire bonne figure, elle se rend le cœur lourd, avec son frère et sa sœur, à la fête donnée pour Noël par leur parrain Drosselmeyer. Refusant de danser avec son père, elle préfère rechercher la clé. Mais au bout du fil d’or qui la mène à son cadeau, il y a un monde étrange, et une petite souris espiègle qui lui volera l’objet tant convoité...

S’il faut reconnaître à cette adaptation du conte d’Hoffman (Casse-Noisette et le Roi des souris, 1816) et du ballet de Tchaïkovski (composé en 1892 sur la base de la version d'Alexandre Dumas, Histoire d'un casse-noisette), c’est la splendeur de ses costumes et la richesse indéniable de ses décors. Une composition qui permettra au spectateur le moins attentif de s’extasier à chaque nouvelle séquence, qu’elle dévoile un château somptueux, un arbre abattu dans une forêt enneigée, un royaume lugubre ou d’autres restés lumineux et débordants de fleurs ou de confiseries. Une beauté picturale qui permettra de faire illusion durant la première partie du film, teinté d’un pesant deuil, de regards tristes et de contrastes assez réussi avec les couleurs chaudes d’un Noël que les autres, encore vivants, attendent. La scène des fils entremêlés, menant aux cadeaux, sera sans doute la plus envoûtante, marquant par son aspect tourbillonnant, le basculement vers un monde imaginaire et onirique.

Malheureusement, l’adaptation centrée autour de la thématique du deuil (ce qui n’est le cas ni dans le conte d’Hoffman ni dans celui de Dumas, même si le passage à l’âge adulte était là aussi au coeur de l’histoire), n’est pas des plus heureuses. Elle permet cependant de rendre plus fluide la compréhension du récit et pour ceux qui découvre ici le conte, de mieux en cerner les principaux enjeux. Cependant, l’ajout d’un conflit entre les royaumes, au-delà de l’affrontement avec le Roi des souris (ici doté d’un formidable rendu en images de synthèses, sous forme d’un monceau de rongeurs formant une silhouette gigantesque) ne fera qu’embrouiller un peu plus les habitués du conte ou du ballet.

Ajoutons à cela l’insupportable cabotinage de Keira Knightley en Fée Dragée et le profond dépit qui nous gagne à chaque apparition d’un personnage de Casse Noisette désespérément transparent (où est passé le prometteur Jayden Fowora-Knight de "Ready Player One" ?) et le film frôle déjà la sortie de piste. Le coup de grâce est sans doute asséné par la quasi absence des thèmes principaux du ballet, aucun n’allant au-delà de l’évocation rapide. Le spectateur un rien attentif, reconnaîtra de ci de là quelques notes au sein de la B.O. composée par James Howard. Mais il repartira forcément frustré par tant d’airs connus demeurés en sourdines, et au final, par tant de beauté sacrifiée sur l’autel de l’action et du rebondissement.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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