DANS LA MÊLÉE

Un film de Matt Carter

Une douloureuse histoire d’amour

Mark est joueur de rugby dans l’équipe 2 d’un club gay de Londres. Il vit dans l’appartement de son compagnon, avec une vue imprenable sur la ville. Mais alors que ce dernier est souvent en déplacements et ne s’intéresse pas à ce sport, il se fait aborder en boîte de nuit par Warren, un des joueurs de l’équipe 1, longtemps absent à cause d’une blessure, et lui aussi en couple, mais avec un autre joueur de son équipe. S’ensuit une nuit de sexe passionnelle, d’où les deux sortent avec l’envie de se revoir, mais le frein de leurs relations respectives les oblige à jouer la distance. Un jour, Warren convainct cependant l’entraîneur de le refaire jouer, mais dans l’équipe de Mark, se faisant alors au passage quelques ennemis lorsqu’il est désigné meilleur jouer de leur premier match…

Jusque-là directeur de la photographie et des effets spéciaux, Matt Carter nous livre ici un film frontalement gay, puisqu’ici quasiment tous les personnages sont homosexuels et que l’action tourne autour de deux équipes de rugby, dont l’une est menacée de fermeture, faute de résultats. Centré sur deux personnages s’engageant dans une liaison passionnelle malgré leurs compagnons respectifs, l’un symbolisant l’usure et la routine du couple (le petit ami de Mark), l’autre la reconnaissance d’une forme de dette morale (le compagnon de Warren), le film traite donc de l’adultère, non sans éviter certains aspects moralisateurs, ou certains clichés sur le couple « bourgeois ».

Bien sûr le tout est construit sur un parallèle entre les valeurs du rugby (fraternité, célébration, cohésion d’équipe...) et celles de chacun des protagonistes en amour (fidélité, épanouissement, honnêteté...), et cela fonctionne plutôt bien. Mais c’est surtout grâce aux deux interprètes principaux que l’ensemble nous emporte, leur charisme comme leur complicité laissant l’idéal que semble représenter ce couple infuser au sein d’une histoire qui aurait pu virer au sordide. Avec eux, on se prend à oublier l’ami alcoolique (et amoureux), ressenti comme un poids, à oublier les deux équipes et le chaos potentiel lié à la découverte de leur liaison, à rêver d’un possible qu’on sait déjà biaisé et dévastateur pour d’autres. Et c’est paradoxalement leur moment le plus heureux (les vacances improvisées à la neige), qui marquera un tournant dans leur propre perception des choses, ceci par la confrontation avec l'expérience de personnes extérieures à leur quotidien.

Si chaque histoire a ses propres zones d’ombres et d’entailles à une fidélité espérée mais souvent fantasmée, si chaque confrontation avec l’adultère est vécue d’une manière différente, par ceux qui trompent comme par ceux qui sont trompés, l’histoire de Mark et Warren nous livre sa version des choses, à ne prendre ni comme un modèle, ni comme un symbole. Malgré une longueur peut-être un peu excessive, le scénario mêlant rebondissements autour de l'avenir de l'équipe 2 de rugby et autour de l'avenir de ce duo aux sentiments grandissants, finit par générer une irrépressible émotion. Une jolie découverte.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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