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SUZANNA ANDLER

Un film de Benoît Jacquot

Un vaudeville bourgeois figé dans l'esthétisme

Suzanna Andler, femme de la haute bourgeoisie, séjourne sur la Côte d’Azur pour visiter une immense maison à louer pour les vacances. Son amant la rejoint et Suzanna tente de faire le point sur sa vie amoureuse…

Suzanna Andler film movie

Pour la petite histoire, Benoît Jacquot, qui était l'assistant et l'ami de Marguerite Duras, a toujours eu beaucoup d'affection pour une de ses pièces "Suzanna Andler". Méconnue et très peu jouée, cette œuvre était boudée par la romancière qui la trouvait inappropriée à l'heure de mai 68. Pourtant, à la fin de sa vie, Duras demandera à Jacquot de l'adapter en film. Une promesse qu'il honore aujourd'hui, 25 ans après sa mort.

Suzanna Andler est une femme discrète et trompée. Pour conjurer le sort, elle prend un amant. Mais cela ne la satisfait pas, car à présent elle ne sait toujours pas lequel peut la rendre heureuse. Une incertitude qui rythme son quotidien de pensées contradictoires. Doit-elle louer la villa ? Veut-elle aller à Cannes avec son amant ou retourner à Paris retrouver son mari ? Ainsi se construit et se déconstruit le récit au travers de dialogues sans cesse remis en question la seconde qui suit.

Peu d'émotions se dégagent de ces discussions fleuves. Chaque phrase est prononcée avec retenue telle une errance de pensée qui n'a pas de but. Seuls quelques très rares éclats de voix viennent perturber cette journée d'antagonismes introspectifs. « Je suis restée pour me tuer, puis finalement j'ai dormi », cette phrase prononcée avec détachement par Charlotte Gainsbourg, décrit bien l'atmosphère étrange et feutrée qui émane de cette pièce sans grand relief.

Afin d'éviter de ne pas réduire son film à du simple théâtre filmé, Benoît Jacquot mise tout sur l'esthétisme. De lents plans séquence enveloppent les personnages dans la lumière blanche d'une belle journée d'hiver. La bâtisse, immense et minimaliste, semble presque fantomatique dans cette large crique sauvage baignée de soleil. Une dichotomie que l'on retrouve dans le personnage de Suzanna. Portée par la silhouette sylphide de Charlotte Gainsbourg, elle est infiniment élégante dans sa mini robe Yves Saint-Laurent. Mais ses longues bottes de cuir aux imposants talons jurent avec l'innocence de sa coupe de petit garçon. Rien n'est laissé au hasard pour renforcer cette sensation d'indécision sans fin.

Malheureusement, la beauté qui se dégage du film ne réussit pas à sublimer un récit volatile et tourmenté auquel on a du mal à adhérer. Duras n'aimait pas sa pièce en 68 et, force est de constater, qu'on ne l'apprécie guère plus aujourd'hui.

Gaëlle BouchéEnvoyer un message au rédacteur

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