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PIECES OF A WOMAN

Un film de Kornél Mundruczó

Un drame poussif, au thème essentiel, porté par une actrice habitée

A Boston, Martha et Sean Carson attendent un enfant. Lui, travaille sur un chantier, à la construction d’un pont. Elle, travaille dans des bureaux. Alors que le contractions commencent, la jeune femme, devant accoucher à domicile, appelle sa sage femme. Celle-ci étant déjà mobilisée sur une autre naissance, c’est une remplaçante qui arrive en urgence. Mais la naissance tourne mal, et le bébé, en détresse respiratoire, meurt. Le couple se laisse alors convaincre de poursuivre en justice la sage-femme, pour négligence…

Pieces of a Woman film

"Pieces of a woman" est à la fois un drame essentiel et une grosse déception. Mis en scène par le réalisateur hongrois Kornel Mundruczo, le film s’attaque à un sujet moral fondamental : celui du deuil de l’enfant chez la mère. Le scénario prend pour cela plusieurs biais : celui du devenir de la relation intime entre femme et mari, celui de l’invasion d’une souffrance personnelle par des extérieurs (mère, beau frère…), et celui, qui touche là au sujet de société, de la judiciarisation du deuil, avec le procès intenté à la sage femme qui l’a accompagnée pour donner naissance à domicile. Le scénario propose ainsi, au fil des réactions des proches et du personnage féminin lui-même, plusieurs pistes d’action, entre acceptation de la fatalité, recherche d’un coupable et besoin de vivre à nouveau.

Habitué à creuser des questions morales, Mundruczo, plutôt habitué du Festival de Cannes, où il a présenté les troublants "Delta", "White God", et "La Lune de Jupiter", a vu ce qui est son premier film en langue anglaise, se faire accueillir plutôt fraîchement, en compétition au Festival de Venise 2020. Ce qui n’a pas empêché Vanessa Kirby, tout juste habitée par son rôle de femme meurtrie, de remporter un Prix d’interprétation féminine fort mérité, tant elle parvient à incarner souffrance physique comme morale. A ses côtés, Shia LaBeouf ne démérite pas, mais c’est surtout Ellen, Burstyn, en mère à la fois odieuse et protectrice, qui marquera les spectateurs.

Si la scène d’ouverture du film, montrant l’accouchement sur une bonne vingtaine de minutes, est absolument saisissante, la caméra passant avec frénésie de visage en visage, au ventre de la protagoniste, et nous laisse épuisés, la suite s’avère bien lointaine du cinéma de ce grand cinéaste. La sur-utilisation de symboles (des plantes décrépies ou un ballon dégonflé pour incarner l’état du couple, le pont en construction pour des liens familiaux amenés à résister ou être détruits, les graines de fruits dans la main d’une enfant croisée dans la rue pour la maternité...) finit par étouffer toute les thématiques pourtant essentielles abordées dans le film. Certains s’agaceront donc, pendant que d’autres seront tout de même bouleversés par une approche intelligente des détails qui qui focalisent la colère (voir la dispute autour de l’orthographe du prénom sur la pierre tombale…) ou la tentation vicieuse de « transmettre sa souffrance à quelqu’un d’autre » en recherchant à tous prix un coupable. Si le message est clair, la forme n’en est pas moins pesante.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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