Bannière Reflets du cinéma Ibérique et latino américain 2024

MES PROVINCIALES

Un film de Jean-Paul Civeyrac

Une séduisante chronique des jeunes années d'un cinéaste

Étienne part à Paris pour suivre des études de cinéma. Il laisse derrière lui sa petite amie, qui elle, reste dans le sud. A l’université, il fait la connaissance de Jean Noël, un autre apprenti cinéaste, et de Mathias, un petit génie dont la réputation de créateur libre fascine ou révulse, selon les gens...

Jean Paul Civeyrac ("A travers la forêt", "Des filles en noir") nous invite à suivre le quotidien d'un jeune étudiant en cinéma, monté à Paris pour sa formation, et découvrant la vie autant que ce qui sera son art. Observateur face aux courants de pensée qui traversent sa classe de Paris VIII et créent forcément quelques tensions, il s’installe en colocation avec Valentina, part indirecte de son éducation sentimentale.

Dans un élégant noir et blanc, l'auteur construit son film en forme de boucle, d'une scène de tendresse au lit à une autre, et donne à voir l'affrontement de deux visions du cinéma. Il propose un chapitrage, parbole du parcours du jeune homme (Un petit château de bohème, Un illuminé, Une fille du feu, Le soleil noir de la mélancholie), tentant cependant un peu vainement de faire ressentir chez son personnage central, ce « besoin de cinéma » tant revendiqué. Indécis, peu souriant, réservé, celui-ci est interprété par Andranic Manet, et va devoir se positionner entre amour de jeunesse et nouvelles relations, entre amis fidèles et admiration pour un modèle inaccessible autant qu’ingrat. Des choix difficiles qui font qu'il est compliqué d'entrer en totale empathie avec la sorte d’égocentrisme placide qu’il dégage au final.

Jouant d’un humour léger (la récurrence des références à un fonctionnement de la fac bien obscur), Civeyrac tisse des relations crédibles qui questionneront chacun sur la cruauté de ses comportements de jeunesse. Si globalement le film parvient à donner envie de faire des films, il n'évite cependant pas quelques poncifs sur un cinéma d'auteur revendiqué, et l'émotion qui est sensée s'en dégager, loin des modes. Certains ricaneront peut-être à la naïveté de certaines répliques telles « si j’ai dormi c’est que c’était trop pour moi »… et « quand je me suis réveillée c’était encore plus beau ». Heureusement, la plupart des dialogues sonnent juste et prônent sainement le devoir de rester fidèle à soi-même, en art comme en amour. Un message auquel on ne peut qu’adhérer.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

Laisser un commentaire