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UPSTREAM COLOR

Un film de Shane Carruth

Complexe et passionnant

Une femme est victime d un mystérieux assaillant qui lui injecte un ver dans le corps. En état d’hypnose pendant plusieurs jours, elle est totalement sous contrôle de cet étranger et se fait dépouiller de tout son argent. Quelque temps plus tard, elle tombe dans le métro sur un homme qu’elle n’avait jamais rappelé, et s’aperçoit que lui aussi porte une marque à la cheville. Ils entament une relation, tentant de surmonter leurs peurs et de découvrir la vérité…

Second long-métrage du réalisateur du culte mais touffu "Primer", "Upstream Color" est une sorte de puzzle complexe, reliant des moments de vie et diverses sensations. Il s’agit là d’une œuvre foisonnante et à part, qui en perdra plus d’un en route, mais qui permettra aux plus patients de disserter pendant des heures, sur les possibles significations de toute cela, ainsi que de l’ordre véritable dans lequel se déroule l’intrigue.

Tentant de recoller les morceaux, le spectateur attentif pourra y voir une parabole sur la malbouffe (sommes-nous tous des cochons, comme ceux utilisés ici à des fins mystérieuses ?), une fable sur l’industrie agro-alimentaire et ses conséquences sur l’environnement, une histoire d’amour sous influence, un avertissement sur les manipulations génétiques ou une dénonciation de la cupidité de certains et de la préférence d’autres pour l’oubli et l’évasion.

Observez bien les premières images, elles vous donneront peut-être une clé de l’affaire. Reste qu’en apparence la boucle bouclée semble un cercle impossible, semant le trouble sur le déroulement temporel des événements. Suivi d’une heure et demie de questions-réponses suite à la projection officielle dans la section Panorama du Festival de Berlin 2013, "Upstream Color" aura fait débat. Il faut dire que l’élevage de cochons, la figure d’un créateur, les séries de dossier de gens contaminés, les transplantations et autres images médicales, la contamination en chaîne (à l’image du texte recopié machinalement par l’héroïne lorsqu’elle est sous contrôle au début...), tout concourt à épaissir en apparence le mystère.

Le film mérite cependant qu’on se laisse aller, en reléguant de côté un instant toute construction intellectuelle, pour mieux apprécier cette œuvre sensorielle où le travail sur les effets sonores a une importance particulière, ainsi que la sensualité d’images (gros plans sur les bras, les mains, des pieds qui se touchent, des frottements contre des draps...) qui traduisent l’intimité. Cela permettra de mieux prendre de plein fouet cette œuvre saisissante, qui semble au final inciter le citoyen à prendre les choses en main, pour revenir à des dispositions saines.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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