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UNE FAMILLE SYRIENNE

Un film de Philippe Van Leeuw

Une implacable immersion dans l’enfer de Damas

Dans un Damas déserté, soumis aux bombardements quotidiens et aux combats de rue, une femme prend soin de ses deux filles, de son fils et de son beau-père. Barricadés dans leur appartement, ils voient un matin par la fenêtre le mari de la jeune voisine du dessus se faire abattre par un sniper. Terrifiés, ils décident de ne rien dire à celle-ci, histoire de ne pas se faire repérer…

"Une famille syrienne" (qui aurait gagné à garder son titre provisoire "Nous resterons à Damas") propose de suivre, de l’intérieur, une journée dans la vie de plusieurs familles syriennes, regroupées dans le même appartement, alors que le danger se rapproche. S’ouvrant sur la menace que constitue le conflit, avec force bruits d’hélicoptères, de bombardements ou de tirs extérieurs, le film se refermera sur quelques larmes et un appel matinal à la prière qui n’a presque plus rien d’un espoir.

Entre-temps, ce huis-clos implacable donnera à percevoir de près la peur chevillée au corps des civils qui tremblent pour les leurs, agissent parfois avec sagesse parfois avec tactique, tentant de sauver leurs proches comme leur peau et finissant par presque oublier qu’il existe un monde à l’extérieur. Telle une cheffe de clan, le personnage de la mère (interprété avec intensité par une Hiam Abbass aussi réfléchie que désemparée) tâchera ainsi de maintenir en vie sa famille, du grand-père aux enfants, mais aussi la voisine et son bébé, ou le petit ami d'une des filles.

Avec un énorme travail sur le son, des bombardements se rapprochant jusqu’aux coups répétés sur la porte barricadée, la tension ne fait qu'augmenter au fil du film, pour atteindre son apogée lors d'une scène à la limite du soutenable. Traitant avec subtilité des choix impossibles qu’il faut parfois faire, en dépit des notions de justice ou de respect, "Une famille syrienne" développe avec justesse les concepts de courage et de lâcheté, ainsi que l'instinct de survie. Un film qui a reçu un Prix du public fort mérité dans la section Panorama du dernier Festival de Berlin.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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