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LE TRÉSOR

Un film de Corneliu Porumboiu

Aussi joliment sarcastique que politique

Un voisin demande à un père de famille de lui prêter 800 euros pour un projet qu’il ne veut pas initialement révéler. Le père de famille s’avérant réticent, il lui avoue qu’il s’agit de louer un détecteur de métaux pour retrouver un trésor que son grand-père aurait caché dans son jardin il y a 50 ans. Il lui propose de l’associer à l’affaire. Mais, employé du fisc, le père sait qu’il faudrait déclarer tout trésor trouvé…

Film roumain découvert en 2015 dans la section Un certain regard du Festival de Cannes, "Le trésor" a reçu le prix Un certain talent. Sur la base d'une trame certes conventionnelle, le film mêle humour noir et fond politique, mais prend au final des détours inattendus. Débutant sur une histoire de dettes et de voisinage, le scénario s'amuse à balader ses personnages d'expert en expert, soulignant l'incompétence des entreprises locales (un des détecteurs ne cesse de biper partout...) avant qu'une boîte ne soit enfin découverte.

Sous couvert d'un récit centré sur deux personnages aux motivations différentes, l'un méfiant, l'autre beau parleur, c'est l'individualisme galopant, l'appât irraisonné du gain lié à l'entrée dans le système capitaliste, qui est pointé. Corneliu Porumboiu (« 12h08 à l'est de Bucarest », « Policier, Adjectif ») positionne d'ailleurs en toile de fond, de manière ponctuelle, une télévision qui délivre des récits alarmistes sur la crise et la détérioration de l'environnement. Le tout concourt à créer une atmosphère de doute, à la fois sur les intentions du voisin et la véracité de l'existence du trésor.

Pointant la corruption qui gangrène le pays et la tentation de la fraude fiscale, le réalisateur roumain dénonce au final le mirage d'un pays jadis opulent, et l'espoir que cet état reviendra sans effort. Il s'invente également un final en forme de vengeance vis-à-vis d'une Allemagne omnipotente en Europe, qui en fera sûrement rire certains plutôt jaune. Quant aux allusions à Robin des bois, le symbole d'une potentielle justice sociale, elles apparaissent comme un ironique point de vue, au début (le père raconte l'histoire à son fils) et à la fin (de manière musicale).

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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