L'INCONNU DU LAC
Touchante et caustique vision de l'amour au masculin, autour d'un lieu de drague sublimé
L'auteur des fantasques et jouissifs "Pas de repos pour les braves" et "Voici venu le temps", nous revient avec une histoire de rencontre en lieu ouvert, faisant une nouvelle fois de la nature un lieu accueillant pour l'épanouissement de ses personnages, et transformant un lieu de drague gay, potentiellement glauque, en lieu romanesque, source de discussions décalées et de comiques de situation dont il a le secret.
Loin de la folie douce qui faisait le charme de ses premiers film, le Guiraudie qui s'intéresse de près à la sexualité des homos (déjà avec "Le Roi de l'évasion") n'en est pas moins drôle et grave à la fois, abordant mine de rien, derrière rencontre et enquête, les différences de conception du couple, l'évolution de la relation au sexe avec l'âge, et surtout la spirale d'une vieillisse menant à un fatal désenchantement.
Conservant toute la grâce de ses dialogues et l'incongruité du comportement de certains personnages, Guiraudie joue l'unité de lieu pour mieux dépayser le spectateur (tout le film se déroule autour du lac, entre parking, plage et bois). Si personne ne lui reprochera de montrer, plus qu'évoquer, la sexualité entre hommes, on regrettera l’appesantissement peu utile sur quelques gros plans (un 69, un cunnilingus, une pipe, une éjaculation...).
Observant des homosexuels « consommateurs » de sexe, il nous livre en ces lieux si familiers et si lointains à la fois, quelques figures savoureuses, de l'amant mystérieux au physique « seventies » au bisexuel bavard, en passant par l'inspecteur qui passerait aisément pour un vieux pervers (et cadre donc parfaitement dans les lieux), jusqu'au voyeur compréhensif et poli. Auréolé du prix de la mise en scène à Un certain regard au Festival de Cannes 2013, "L'Inconnu du lac" est un film réjouissant, dans lequel le sexe est aussi facile que bonjour, mais où les relations humaines restent encore et toujours compliquées.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur