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FAUST

Un film de Aleksandr Sokurov

Un Lion d'or foisonnant

Le Docteur Faust pénètre dans le laboratoire d’un autre, où se pratique l’élongation et la dissection, des pratiques qu’il observe tout en les critiquant…

Après quelques apartés avec « Père et fils » et « Alexandra », Alexandre Sokurov a enfin dévoilé, en compétition au Festival de Venise 2011, sa version de « Faust ». Le film constitue le quatrième volet de sa tétralogie sur le pouvoir, après « Moloch » sur Hitler, « Taurus » sur Lénine et « Le soleil » sur l'empereur Hiro Hito du Japon. Le réalisateur russe nous livre ici une adaptation libre (partielle et partiale) du roman de Goethe, en allemand dans le texte. Dans les trois premiers volets, des hommes au pouvoir découvraient qu'ils étaient humains et apprenaient l'isolement qui va de paire avec le pouvoir. Dans « Faust », un homme rechigne à se laisser aller aux pulsions humaines qui l'habitent : cupidité, désir de chair... Le récit conte l'influence grandissante sur cet homme rationnel (il est médecin) d'un personnage diabolique (Mephistofeles) qui va lui faire découvrir toutes les facettes de sa ville et de l'humanité, jouant sur la tentation pour le faire céder à ses envies (et lui donner le pouvoir en échange de son âme).

Sokurov signe ici un film à la mise en scène somptueuse, dotée d'une photographie d'une beauté indescriptible que l'on doit au Français Bruno Delbonnel. Le metteur en scène n'a de cesse de varier l'ampleur du champ, passant d'une scène d'intérieur confinée, à de vastes espaces, composant de véritables tableaux aux multiples figurants (la scène des bains...). Il dynamise la moindre scène d'intérieur, variant perpétuellement les points de vue, ne laissant aucun répit à sa caméra. Ode au désir sans âge, son film tout en nuances de gris, s'illumine tout d'un coup lorsque l'objectif rencontre le visage de l'être aimé. Un visage diaphane aux contours embrumé, dont la finesse des traits égale celui de couleurs utilisées.

Dans « Faust », il se passe toujours quelque chose dans le cadre. Emporté dans un véritable tourbillon pour les sens, porté par une discussion au cordeau entre un Mephisto d'aspect humain mais déformé dans sa chair et un Faust qui veut bien paraître, le spectateur ne sait plus où donner de la tête. Fort justement récompensé du Lion d'or, Sokurov compose une œuvre foisonnante qui mérite plusieurs visions et demande une attention de chaque instant. Un film où la femme est libérée par le travail, où la jeunesse fait des jaloux et où beauté et pouvoir, indéniables objets de convoitise, trouvent leur parfaite transcription à l'écran.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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