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ARLO, LE GARÇON ALLIGATOR

Un film de Ryan Crego

Un "Freaks" animé, coloré et musical

À sa naissance, Arlo, un garçon mi-humain mi-alligator, est abandonné dans les égouts de New York. Le courant emporte son couffin jusqu’en Louisiane, où il est recueilli par une femme solitaire vivant dans les marécages. Quinze ans plus tard, elle lui révèle une partie de ses origines grâce aux quelques indices qu’elle avait trouvés à ses côtés dans le couffin. Arlo décide alors de rejoindre New York pour rencontrer son père…

Arlo, le garçon alligator film movie

Sortie le 16 avril 2021 sur Netflix

Si Netflix estime que ce long métrage d’animation est visible à partir de 7 ans, on recommandera un petit accompagnement pour les plus jeunes, car tout ne convient pas aisément aux moins de 10 ans. Le film s’ouvre avec un ton relativement sinistre, sur fond d’abandon de couffin dans les égouts (probable référence biblique au passage), et quelques scènes peuvent heurter les plus craintifs (surtout avec la « bête »). D’autre part, notons quelques moments un peu embarrassants dans le cadre d’un dessin animé pour enfants (qui auraient plutôt leur place dans un film ciblant les adultes), comme la scène où des personnages surprennent un chat et une vache en train de se bécoter dans un train, ou lorsqu’on rencontre Marcellus, un vieux poisson qui se trémousse en slip et qui fait penser à l’ancienne marionnette de DSK en peignoir dans "Les Guignols de l’info" !

Malgré ces avertissements, "Arlo, le garçon alligator" se pose comme une énième fable sur l’acceptation des différences, avec des personnages plus ou moins mutants qui cherchent à être acceptés comme ils sont, pour leurs qualités « humaines » et rien d’autre, faisant de ce film un lointain cousin du "Freaks" de Tod Browning ou de la saga "X-Men". Le message général n’est donc pas très nouveau et ne surprend pas plus que les grandes lignes du scénario, mais ce dessin animé exubérant et acidulé, tantôt sombre tantôt joyeux, s’avère plutôt enthousiasmant et parvient parfois à bousculer les conventions et le politiquement correct (tournant par exemple en dérision le monde de la mode ou s’amusant de la façon dont les retrouvailles père-fils sont interrompues).

Du côté des protagonistes, le film alterne entre stéréotypes et combat des stéréotypes, et la tendance anti-stéréotypes a presque tendance à devenir elle-même stéréotypée par moments ! On applaudira par exemple les touches queer (notamment la boule de poils roses à la voix grave – personnage interprété en VO par un coiffeur non-binaire très médiatique aux USA) ainsi que le féminisme et l’anti-grossophobie qu’incarne Bertie. Mais on pourra soupirer quand cette dernière se présente d’abord comme végane (ça sonne comme une promotion puérile de type « vous voyez la force qu’on peut avoir si on ne mange pas de protéines animales ! »). Le film n’échappe pas non plus à quelques clichés comme le redneck (bouseux décérébré par excellence) ou le petit Italo-Américain nerveux et quasi mafieux.

Par ailleurs, on pourra ressentir une légère frustration en ne sachant quasiment rien du passé des personnages (sauf pour Arlo et son père). On aimerait notamment fouiller plus du côté de Bertie (d’où viennent sa force surhumaine et son rapport particulier à l’océan ?) ou d’Edmee (on apprend au détour d’une réplique que celle qui a recueilli Arlo a fait de la prison et qu’elle fuit une possible autre peine). On peut se consoler en espérant avoir une partie des réponses dans la série animée que Ryan Crego est en train de développer pour Netflix et qui devrait s’intituler "I [Heart] Arlo".

L’ensemble du métrage reste très plaisant, entre autres grâce à une belle animation 2D. Pour peu qu’on aime la pop, la bande originale peut également vous entraîner ou vous émouvoir – du moins en VO car la version française des chansons est plus fade. Remarquons au passage qu’un des personnages secondaires est doublé par Flea, le bassiste des Red Hot Chili Peppers, mais que celui-ci ne participe aucunement à la musique du film. On appréciera notamment l’énergique ode à l’optimisme interprétée par Michael J. Woodard au début du film ("More More More") et l’attendrissant "Follow Me Home" chanté par Mary Lambert.

Raphaël JullienEnvoyer un message au rédacteur

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