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ABOVE THE DUST

Un film de Wang Xiaoshuai

Attachement au lieu et inéluctable exode rural

En Chine, dans le petit village où vit Wo Tu, âgé de dix ans, presque tous les enfants ont un pistolet à eau. Wo Tu lui aussi en voudrait un. Et il espère que son père lui en ramènera un de la ville. Comme ce n’est toujours pas le cas, son grand-père, malade, lui promet qu’une devenu un fantôme, non seulement il sera toujours auprès de lui, mais il lui offrira le pistolet à eau de ses rêves…

Amenant rapidement le décès du grand-père, de manière onirique, alors que Wo Tu aperçoit une silhouette floue au bord de la rivière, "Above the Dust" est un conte moderne, filmé à hauteur d’enfant, mêlant éléments de contexte social et éléments fantastiques. En effet, le fantôme du grand-père, comme d’autres, deviennent visibles pour l’enfant comme pour le spectateur, lançant une étrange chasse au trésor familial (celui de son propre père), supposé enterré à proximité de la maison. Abordant ainsi à la fois l’exode rural (le père travaille à la ville et part régulièrement pour de longues périodes), la politique de planification urbaine de la Chine (le gouvernement a construit un nouveau village, où la femme est pressée d’aller s’installer…), et le passé du pays, avec les richesses cachées à l’aube de la confiscation des terres et des biens personnels par le régime communiste.

Évoquant ainsi par quelques flash-back, le passé de l’arrière grand-père, les brigades, mais aussi relatant l’avidité dans un pays devenu communiste et capitaliste à la fois, avec le personnage de l’alcoolique venu aidé sa mère, et auquel Wo Tu dérobe sa fiole pour éviter le pire. Transformant la croyance de l’enfant en la persistance du contact avec son grand-père, en un vecteur de la fièvre de l’or irrationnelle qui s’empare de ce qui reste du village, Wang Xiaoshuai, à qui l'on doit le très beau "So Long, My Son", ou encore "11 fleurs", "Une famille chinoise" et "Beijing Bicycle", évoque un nouveau tournant dans la société chinoise. Sa mise en scène délicate, usant à foison du cadre dans le cadre et des contre-jours, laisse place aussi à quelques traits d’humour (l’apparition des grands moyens pour creuser, l’aspect taupinière du terrain…) et utilise aussi le « pistolet » et la tempête de sable comme d’intéressantes paraboles. Une jolie évocation enfantine d’un inéluctable exode rural, synonyme de perte de patrimoine et de paysans sans terres.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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