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INTERVIEW

MASCARADES

Journaliste:
Mascarades a reçu le prix du meilleur film arabe au festival du film du Caire. En tant que réalisateur Franco-algérien comment peut on définir un film « arabe » ?

Lyes Salem:
Alors là c’est un mystère. Pourquoi faire deux catégories ? Une international et une ara…

© Haut et Court

Journaliste:
Mascarades a reçu le prix du meilleur film arabe au festival du film du Caire. En tant que réalisateur Franco-algérien comment peut on définir un film "arabe" ?

Lyes Salem:
Alors là c'est un mystère. Pourquoi faire deux catégories ? Une international et une arabes ? D'autant plus que celle international a beaucoup plus de catégorie de prix. J'ai failli partir quand j'ai su que les films était séparés. Non mais ça veut dire quoi ?!

Journaliste:
Les personnages du film parlent en algérien, une langue considérée comme un dialecte par le gouvernement algérien. Pourquoi ce choix ?

Lyes Salem:
Le film en lui même n'est pas militant mais ce choix est un acte militant. Comme vous l'avez dit l'algérien est considéré comme un dialecte mais c'est dans cette langue que tout le monde se parle en Algérie, c'est dans cette langue que l'on vit, qu'on dit "Je t'aime". C'est un mélange d'arabe classique, d'arabe algérien, de français, d'anglais... A la télévision ou au cinéma on utilise toujours l'arabe classique qui est très officiel et que personne n'utilise dans la vie courante. Cette langue, l'algérien, c'est la langue de la nouvelle génération et c'est pour elle que j'ai fait ce film, je voulais qu'il s'adresse directement a eux. Je dédit d'ailleurs mon film aux spectateurs algériens.

Journaliste:
Dans votre film il y a une effervescence, une énergie qui peut faire penser aux film d'Emir Kusturika. Vous soutenez cette comparaison ?

Lyes Salem:
Tout a fait, la fantaisie des films de Kusturika colle bien à l'histoire du film, c'est une histoire qui relève presque du conte, c'est une fiction, l'histoire n'est pas réaliste, mais elle est vraisemblable. C'est pour ça que j'ai enlevé tout ce qui est drapeaux ou panneaux sur les lieux de tournage. On sait que c'est en Algérie mais comme Kusturika j'ai voulu traiter l'histoire avec un décalage. J'aime beaucoup ses films et c'est sûr qu'il y a une "influence kusturitienne" parce que je retrouve effectivement une énergie dans ses films que je ressent en Algérie.

Journaliste:
Le film est sorti en septembre en Algérie, en pleine période du Ramadan. Comment le public algérien a réagi au film ?

Lyes Salem:
On a eu de très bon retours, de la part des jeunes surtout, garçons comme filles, le film leur parle et c'est ce que je voulais. Le public était très diversifié et je crois n'avoir jamais vu de salle remplie uniquement par des hommes, il y avait autant de femmes que d'hommes, jeunes ou vieux et ça m'a fait plaisir de le constater. Encore une fois, c'est pour eux que j'ai fait ce film et le fait qu'il soit en algérien a été vraiment apprécié, on a fait une dizaine de premières un peu partout en Algérie et j'ai eu plusieurs fois des gens qui sont venus me dire qu'ils se reconnaissaient dans mes personnages et j'en suis ravi.

Journaliste:
On peut remarquer que l'histoire du film est construite un peu comme une pièce de Molière où un père refuse le mariage de sa fille qui a un amant qui finit par l'épouser. C'est là une autre de vos influence ?

Lyes Salem:
Je viens du théâtre, il est donc évident que Molière est l'une de mes références. Bien que je reconnaisse plus une influence de Goldoni, se sont tous deux d'immenses auteurs qui ont su écrire des pièces qui restent d'actualité, donc oui, bien sûr qu'on peut trouver des points communs: ce sont des histoires tellement universelles.

Journaliste:
On remarque par contre que dans votre film le père devient le frère et que en général la famille ne ressemble pas au schéma classique "Père-Mère-Fils-Fille" d'ailleurs la famille recomposé du début s'agrandit tout au long du film, quand tout d'un coup tout le monde devient le frère ou le cousin de Mounir, le personnage que vous incarnez.

Lyes Salem:
Oui, ici je joue avec les codes de la société algérienne. Dès le départ j'ai enlevé les parents des personnages principaux et je n'y fait pas allusion dans le film mais comme je l'ai déjà dit c'est une fiction. La famille s'agrandit à cause de l'intérêt que représente tout à coup Mounir. Et puis vous savez bien que, en Algérie, on est tous cousins.

Journaliste:
Que pensez vous de l'expression "téléphone arabe" ? Vous pensez que c'est un bon terme pour définir le film ?

Lyes Salem:
Oui pourquoi pas, je n'ai pas de revendication ou de blocage à ce niveau là. Vous y voyez ce que vous voulez. Mais c'est vrai que c'est un peu ça l'histoire. Oui tout a fait. C'est pour savoir si vous pouvez intituler votre article comme ça ?

Propos recueillis par Théophile Sclavis

Lycée Saint-Exupéry Envoyer un message au rédacteur

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