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INTERVIEW

LES FILS DU VENT

Julien Seri, Élodie Yung, Yann Hnautra, Châu Belle Dinh, Laurent Piemontesi, Williams Belle, Malik Diouf et Charles Perrière

Réalisatrice - Actrice - Acteurs

Les Yamakasi sont en retard ! Coincés dans des bouchons typiquement lyonnais qui, comme le note un journaliste dans la salle, ne devraient pas leur poser de problèmes : ils n’ont qu’à casser la gueule à tout le monde et grimper sur les voitures ! Mais on n’est pas dans un film et les Yamakasi aff…

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Les Yamakasi sont en retard ! Coincés dans des bouchons typiquement lyonnais qui, comme le note un journaliste dans la salle, ne devraient pas leur poser de problèmes : ils n'ont qu'à casser la gueule à tout le monde et grimper sur les voitures ! Mais on n'est pas dans un film et les Yamakasi affirmeront à leur arrivée une mentalité beaucoup plus pacifiste et zen qu'on ne pourrait croire. Mais en attendant, la jolie Elodie Yung nous fait face, ses camarades la laissant seule dans ce qui est sans doute l'une de ses premières conférences de presse de sa toute jeune carrière : « avant ce film, j'ai passé un an sur la série "la vie devant nous", c'est tout ! » Elle semble être d'autant plus heureuse d'avoir tourné ce film que « d'habitude on cherche une Asiatique typique et pour une fois j'ai eu de la chance, ils demandaient une Eurasienne ! De plus mes 10 ans de pratique du karaté m'ont beaucoup aidé pour ce rôle. » Etre la seule fille parmi tous ces mecs ? « C'était flippant au début et j'ai mis à peu près deux semaines pour m'intégrer, mais après, aucun problème, les garçons sont formidables. »

Finalement on ne regrette pas que les autres aient été en retard car lorsque la troupe arrive, on comprend vite que l'actrice aurait peut-être eu plus de mal à s'exprimer ! Très vite, on cerne ceux d'entre eux qui vont répondre aux questions et ceux qui resteront plus en retrait, mais tout le groupe semble, en tout cas, prêt à rigoler… tout en étant sérieux ! Julien Seri s'empresse d'ailleurs de souligner qu'ils n'arrêtent jamais : « ils s'entraînent partout, même dans le car ! » Le réalisateur semble prendre du plaisir avec ce groupe et se déchaîne parfois autant qu'eux : « dans le film, les seuls trucages ; c'est moi ! Dès qu'il fallait un corps, des muscles, c'était moi ! » La bande de copains (car c'en est bien une) se marre… « Diriger des gens qui se connaissent, c'était à la fois plus simple et plus compliqué », poursuit-il plus sérieusement, « Difficile pour la concentration mais il y en avait toujours un pour ressouder le groupe. » On comprend aussi que Guylain ne répondra pas beaucoup aux questions puisqu'il filme le groupe avec un caméscope : « d'habitude c'est mon rôle ! », rigole le réalisateur.

Mais très vite on s'aperçoit que le sujet de la rencontre a vite tendance à se concentrer sur les Yamakasi en général, sur leur "art du déplacement", sur leur association, plutôt que sur le film. Celui-ci paraît alors être un exemple parmi d'autres pour expliquer ce qu'ils font et ce qu'ils sont. Par contre ils ne manquent pas de passion pour en parler, en particulier Yann, sans doute le plus bavard de la bande : « Au début, c'est parti d'une rencontre de personnes, dans les banlieues, et d'une volonté de rechercher ce qui se rapporte à la force. On a tout essayé (sports de combat, etc) puis on s'est fait tout seuls. Depuis on n'a pas arrêté de s'amuser comme des enfants dans un parc à jeu. » Châu complète : « voir des enfants dans un parc à jeu, à leur niveau, ce qu'ils y font, c'est impressionnant. Nous c'est pareil, à notre niveau. » Yann reprend : « ensuite seulement c'est devenu une culture de vie. Il y a eu une évolution et des choix. Parmi le groupe de départ, une minorité de gens ont continué, formé le groupe Yamakasi et pris la décision d'essayer de faire connaître leur pratique, et lui donner des valeurs pour que les gens ne nous croient pas fous. On a tout arrêté pour vivre de ça et la première année a été très dure. Ca ne rentrait dans aucune case. » Laurent (le moins bavard !) poursuit : « au début, on a fait beaucoup d'évènementiel car les gens préfèrent voir de leurs propres yeux. »

C'est alors que l'interview se recentre un peu sur le film ! « Pour ce film, notre référence à tous que nous voulions approcher, c'était "Time and Tide" de Tsui Hark. Quant au personnage de Kitano, c'est bien sûr un hommage. On aurait rêvé l'avoir pour le film mais ça n'a pas pu se faire pour différentes raisons. » L'argent, sûrement, vu ce que souligne Julien Seri par la suite : « le film s'est lancé au moment où Canal + s'effondrait donc le film en a souffert pour le budget et donc certains personnages et aspects du film. C'est déjà dur de traiter 8 personnages sur 1h30. » D'autant plus frustrant pour le réalisateur qu'il n'avait pas pu aller jusqu'au bout du premier projet Yamakasi dont il était au départ le maître d'œuvre : « Dans le premier, je voulais faire un drame social, mettre en garde, mais le film a perdu de cela et est devenu plus une comédie. » L'un des aspects des "Fils du vent" qui a souffert de ce budget semble être l'éducation des enfants dans le film. « La séquence avec les enfants était importante et touchante pour nous, car c'est un peu ce qu'on fait avec l'association Yamakasi », souligne Williams, qui s'enflamme ensuite pour son personnage : « à travers un personnage de film, il y a un être humain et mon rôle m'a beaucoup intéressé et fait évolué ». Malgré leur manque d'expérience dans ce domaine, les Yamakasi semblent être véritablement intéressés par la comédie, comme l'affirme le jeune Malik : « on est avant tout des sportifs et on essaye d'être comédiens en plus. La suite logique, c'est de faire un film sans ce qu'on fait nous. Faire ce qu'on fait, c'est plus facile pour nous, que la comédie. »

L'interview se termine sur le caractère multiculturel du film, sans doute un point essentiel des "Fils du vent". C'est Charles, l'amoureux du film, qui se lance : « leur amour, c'est la rencontre de deux cultures différentes. On vit dans une époque de métissage donc c'est un message du film. » Le réalisateur conclut avec ferveur : « Faire un film français avec un seul blanc (Laurent, ndlr), ça n'existe pas ! Mais le plus formidable, c'est que personne n'en a parlé ! La monteuse du film m'a pourtant dit n'avoir jamais vu un film si métissé. » Si le film prouve que les gens commencent à vraiment intégrer le mélange des cultures, ce serait déjà en quelque sorte une réussite !

Raphaël Jullien Envoyer un message au rédacteur

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