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INTERVIEW

DANS LES CORDES

Journaliste ADC:
En tant qu’ancienne boxeuse vous-même, vous avez forcément votre manière de voir un combat. Quelles ont été vos influences cinématographiques pour filmer ceux du film?

Magaly Richard Serrano:
J’ai justement essayé de me dégager de ces influences. Car le f…

© Pyramide Distribution

Journaliste ADC:
En tant qu'ancienne boxeuse vous-même, vous avez forcément votre manière de voir un combat. Quelles ont été vos influences cinématographiques pour filmer ceux du film?

Magaly Richard Serrano:
J'ai justement essayé de me dégager de ces influences. Car le film de boxe constituent un genre en soi. Mais aussi car d'autres ont déjà très bien filmé ce sport avant moi.

J'ai tâché de rester au plus près de l'émotion d'Angie. Lors du premier combat, j'ai choisi un regard extérieur, depuis le bas, le pied du ring. On rentre ensuite jusqu'au coeur des coups, jusqu'à une certaine perte de repères... Dans le combat avec sa « soeur », j'ai joué sur le charnel, sur le côté fusion / répulsion. Enfin, avec le dernier, éventuellement fantasmé, j'ai choisi des aspects plus esthétiques de la viloence...

Journaliste ADC:
Votre héroïne, comme vous l'avez fait, part d'une famille imprégnée par la boxe, pour mieux s'en extraire. Cela a été une volonté salvatrice pour vous aussi?

Magaly Richard Serrano:
Elle sort du carcan décidé pour elle. Elle n'est pas à sa place dans cette violence là. Personnellement j'ai eu un rapport à la boxe situé à mi-chemin entre les deux personnages. J'avais un peu le tempéremment de Sandra et les réflexions personnelles d'Angie. J'ai aussi vécu la boxe comme revêtant une certaine injustice, un sport où le charisme compte beaucoup, et où le travail ne paye pas forcément toujours. Il y a une certaine magie chez les champions...

Journaliste ADC:
Vous dites dans le dossier de presse que tout passe par la boxe dans cette famille. Comment expliquez-vous la place que vous avez donné à la radio dans d'autres aspects de la communication?

Magaly Richard Serrano:
Les membres de cette famille n'arrivent pas à se parler. Ils ne communiquent qu'au travers de la boxe: ils se tapent. La mère, elle, est exclue du club, qui est le monde de ses « filles » et de son mari. Elle est encore plus seule. Elle n'a personne à qui se confier hormis à cette radio, au travers d'un coup de fil lors d'une émission.

Je ne pense pas qu'elle ai peur réellement de sa famille. Mais sa fille lui a échappé, elle ne vit pas dans la même sphère. Et en même temps, elle veut que sa fille garde sa place dans les yeux du père...

Journaliste ADC:
Vous décrivez un quartier d'habitat social, où l'espace public est fuit. On le traverse en courant, coursé parfois par des bandes en voiture. Ou on tente de ne pas y rester, comme lorsque le père ramasse les vêtements de la cousine par terre, et exprime sa honte d'être vu dehors...

Magaly Richard Serrano:
Cette famille vit en vase clos. Personne ne vient jamais chez eux. Peut être parce qu'ils se sont construits sur un mensongent. Alors ils se cachent. Et puis les filles sont prises en main par le père, qui les a éduquées et ne veut certainement pas les voir traîner dehors. Dans ces quartiers, ceux qui sortent ce sont les « racailles ».

La salle est finalement elle aussi très protégée. Dans des scènes qui ont été coupées au montage, on voit très bien comment le père empêche n'importe qui d'y rentrer. Au fond, le boxeur se construit un peu en opposition au « bandit ».

Journaliste ADC:
Vous n'avez pas eu envie de mettre le personnage de Bruno Putzulu plus en avant?

Magaly Richard Serrano:
J'ai déjà réécrit le rôle pour lui, en élargissant sa présence. Mais le premier montage faisait déjà 2h20, et son personnage ne fait pas partie intégrante de la famille.

Son regard à la fin résume parfaitement la relation qu'il a avec le père. Elle se passe de mots, comme lors de la préparation dans les vestiaires. C'est un beau rôle.

Journaliste ADC:
Comment avez-vous choisi les deux filles?

Magaly Richard Serrano:
J'avais vu Louise Szpindel dans un téléfilm. Il y tenait déjà un rôle physique et volontaire. Elle a passé un petit casting pour le principe, mais je tenais à travailler avec elle.

Quant à Stéphanie, ce fut un coup de foudre de casting. Elle était à la fois détonnante, explosive, drôle et touchante.

Toutes deux ont eu droit à un entraînement de près de 10 mois.

Journaliste ADC:
N'est-il pas étrange de recevoir une subvention de Rhône alpes cinéma, pour un film situé entièrement à Vtry sur Seine?

Magaly Richard Serrano:
Je ne me suis pas occupé du tout de ces démarches. Mais je pense que comme la plupart des Régions, Rhône Alpes cinéma s'attache plus à un projet culturel qu'à l'image touristique de la Région qu'il pourrait montrer.

Journaliste ADC:
Quels sont vos projets maintenant?

Magaly Richard Serrano:
J'ai intégré une résidence d'écriture pour finaliser un nouveau scénario. J'ai aussi quelques projets pour la télévision, dont une série produite par un ami. J'espère juste que pour le prochain film, les choses iront plus vite. Car pour « Dans les cordes », cela m'a pris 6 ans dans ma tête, et près de 3 ans depuis la production jusqu'à la sortie en salles le 28 mars prochain.

Olivier Bachelard Envoyer un message au rédacteur

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