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INTERVIEW

ASSAUT SUR LE CENTRAL 13

La façon de travailler avec les acteurs américains paraît à Jean François Richer, complètement différente. Là-bas les acteurs s’effacent derrière le sujet. Quelqu’un comme Ethan Hawke peut jouer une semaine du Shakespeare et se retrouver dans son film la semaine suivante, il s’invest…

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La façon de travailler avec les acteurs américains paraît à Jean François Richer, complètement différente. Là-bas les acteurs s’effacent derrière le sujet. Quelqu’un comme Ethan Hawke peut jouer une semaine du Shakespeare et se retrouver dans son film la semaine suivante, il s’investira toujours autant. Il s’étonne de la manière dont les acteurs travaillent, chacun dans leur caravane, entre les scènes, et font ensuite des propositions. Quelque part, il estime qu’il n’a pas vraiment à les diriger, et qu’ils prennent un peu le chemin qu’ils veulent, en testant des choses.

Dans son film, les personnages ne font pas des choix moraux. Ce sont des choix induits par une nécessité : celle de survivre. Ils se révèlent dans l’action. En aucun cas son film n’est moral. Car le fait d’avoir des flics corrompus est déjà très subversif aux USA, surtout depuis le 11 septembre 2001, car ils sont de véritables icônes depuis. Le fait de remplacer les assaillants par une équipe de police était initialement une idée de John Carpenter lui même. En cela le film est très différent de Nid de guêpe, sorte de remake inavoué, par un autre français, de Assaut de Carpenter.

Pour la mise en scène, il a choisi de tourner caméra à l’épaule, ce qui n’est pas une influence de séries télé récentes, mais plutôt de films comme A bout de souffle de Godard, pour le montage cut par exemple. Il a été très difficile de tourner dans un espace clos. Un plan a été réalisé à l’écriture, pour donner une impression d’étouffement progressif. On reste cependant dans le réalisme, par rapport au film de Carpenter, où on utilisait parfois la même porte pour ouvrir sur plusieurs lieux différents, ce qui donnait un aspect un peu surnaturel au lieu.

Le réalisateur indique s’être plus attaché à la réaction, voulue crédible, des personnages, qui sont pour lui le principal sujet du film. Sa réflexion s’est faite en terme de réactions de ceux-ci, les plus réelles possibles. Ainsi, le choix des acteurs a été primordial. Seule la présence d’un rappeur lui a été imposée par le studio, du fait du genre du film. Il a choisi Ja Rule, sans pour autant estampiller le film, en imposant un morceau du rappeur au générique. Pour les autres, différents noms ont circulé, comme Mark Whalberg, Benicio Del Toro ou Mickey Rourke. Mais l’idée du fonctionnement du duo devait lui rester en tête en permanence. Et les questions de budget ont déjà imposé un certain tri.

S’il avait accepté toutes les règles du système, Maria Bello ne se ferait tuer, Fishburen ne s’en tirerait pas à la fin, les méchants ne seraient pas des flics, et son film ne serait pas interdit aux moins de 17 ans non accompagnés. Il avoue qu’il y a beaucoup d’inconvénients aux USA, à commencer par la taille des équipes de tournage et le poids des unions (syndicats), qui empêche la flexibilité sur le tournage, mais il a beaucoup aimé travailler là bas. Il donne pour exemple le tournage lors d’une vraie tempête de neige, des extérieurs. Il avait demandé une équipe réduite et s’est retrouvé avec 150 personnes. Là bas, tout changement implique un nombre de gens inimaginable, et il est difficile de faire les choses soit même et donc d’expérimenter. Mais on a aussi les meilleurs techniciens du monde.

Jean françois Richet indique qu’il n’a pas voulu tourner en France, car il a le sentiment qu’il aurait dû coller à une certaine réalité sociale, et donner peut être une mauvaise image des cités, ce qu’il ne souhaitait pas faire. Même si le film est censé se dérouler à Détroit, ville où de grandes zones industrielles à l’abandon existent bel et bien, le tournage a eu lieu à Toronto, pour des raisons de budget principalement. Il ajoute, pour terminer, qu’il a eu la chance d’avoir le final cut sur ce film, ce qui est rare. Et que, volontairement, il n’a pas filmé de scènes d’explosion ou de feu sur le tournage, ce qui a évité qu’on lui les impose au montage. Son choix était de filmer des êtres humains avant tout.

Olivier Bachelard Envoyer un message au rédacteur

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