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THE WANDERING EARTH

Un film de Frant Gwo

Des promesses insuffisamment tenues

Dans un futur proche, l’évolution de notre soleil contraint les humains à envisager leur avenir ailleurs. Un projet gigantesque est alors développé : déplacer la Terre jusqu’à l’étoile la plus proche, guidée par une station spatiale et mue par des milliers de propulseurs sous lesquels sont également construites des villes souterraines pour les survivants…

Sortie le 30 avril 2019 sur Netflix

L’idée de départ est farfelue mais séduisante car elle fait rêver : imaginez que dans le futur, au lieu d’abandonner la Terre quand le système solaire sera en fin de vie, on puisse la déplacer vers une autre étoile ! Même s’il est impossible de concevoir que cela soit réalisable, on est prêt à plonger dans cet imaginaire qui laisse un peu de place à l’espoir pour l’avenir de l’humanité, avec un « Gouvernement de la Terre Unie » en prime !

Ainsi, dans un futur indéterminé mais apparemment pas très lointain (on sait seulement que cela se déroule après 2044, puisqu’un détail du décor suggère des Jeux olympiques ayant été organisés à Shanghaï cette année-là), voilà qu’est lancé un projet appelé au nom poétique : « Terre errante » (« Wandering Earth »). Certes, cela implique d’énormes sacrifices : la mort d’une grande partie de la population, le confinement des survivants sous la surface terrestre (avec une loterie pour détermine les personnes qui ont leur place dans ces villes souterraines), un voyage prévu pour s’étaler sur une centaine de générations… Mais la survie de l’espèce humaine est à ce prix.

Le début est donc séduisant, tant pour l’idée que pour l’aspect visuel, cette superproduction développant un style bien à elle qui n’a pas à rougir en comparaison avec le cinéma hollywoodien. Mais "The Wandering Earth" n’échappe pas non plus à des dérives récurrentes des blockbusters américains : des scènes d’action illisibles, un scénario alambiqué ou encore l’agaçante prédisposition à l’auto-centrage qui fait qu’un film de SF se focalise sur le pays qui produit !

Ne nous y trompons pas : ce long métrage fait partie intégrante d’une logique de propagande chinoise à grande échelle pour montrer au monde entier l’ampleur de son savoir-faire dans tous les domaines, s’inscrivant notamment dans le cadre d’un programme spatial très ambitieux. Il est toutefois étonnant que les héros remettent autant en cause l’ordre et la loi, et défient le pouvoir et les règles pour développer leur individualité et trouver des solutions que les autorités ne parviennent pas à proposer ou à accepter. Cela semble ainsi incompatible avec l’idéologie socio-politique chinoise. On nuancera quand même en soulignant que la sauvegarde du bien commun reste l’essentiel de bout en bout.

Si l’enthousiasme domine durant la première demi-heure, on déchante progressivement, notamment à partir de la séquence très confuse dans l’immeuble de Shanghaï. À partir de là, nous en mettre plein les yeux ne suffit plus. On a parfois l’impression de voir un "Fast and Furious" de l’espace qui vire surtout au grotesque film catastrophe de type "Le Jour d’après" tout en pillant (volontairement ou non) des éléments disparates de l’histoire cinématographique de la science-fiction : l’intelligence artificiel MOSS lorgne vers le HAL de "2001, l’Odyssée de l’espace" et le sacrifice d’un protagoniste semble rappeler celui de Bruce Willis dans "Armageddon". Inversement, les idées nouvelles sont réduites à peau de chagrin.

Si l’ensemble reste plaisant et divertissant, la dernière demi-heure paraît interminable, avec une ahurissante et incompréhensible opération de la dernière chance aux Célèbes (en Indonésie). Au final, les incohérences et la confusion ruinent le plaisir que l’on avait eu au début. Seuls les magnifiques visuels de Jupiter aident à faire passer la pilule durant la conclusion brouillonne. Quel gâchis !

Raphaël JullienEnvoyer un message au rédacteur

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