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LA RÉGION SAUVAGE

Un film de Amat Escalante

Une perturbante évocation de l'exclusion

Dans une vallée reculée du Mexique, un couple de personnes âgées offre une femme nue à une étrange créature située dans leur grange. Depuis l’extérieur, ils entendent des gémissements, ressemblant plus à du plaisir qu'à de la douleur. Mais ce qu'ils nettoient après l'acte est pourtant bien du sang. Et dans la région, des personnes continuent à disparaître, mystérieusement...

Le nouveau film du Mexicain Amat Escalante déroutera sans doute plus d'un spectateur. D'autant plus qu'après deux œuvres ultra réalistes ("Los bastardos" puis le très violent "Heli" sur les disparitions et la prostitution forcée), il nous livre aujourd'hui une angoissante fable sur les jugements portés sur des victimes d'abus sexuels ou de violence, dans une société puritaine loin de les considérer au final comme des victimes.

En forme d'allégorie, son film s'ouvre sur une mystérieuse météorite noire flottant dans l'espace, avant de suggérer la présence d'une créature potentiellement dangereuse dont prennent soin deux personnes âgées, au fin fond d'une vallée au vert presque surnaturel. Convoquant un fantastique presque apaisant en contraste avec les vies urbaines de chacun de ses personnages, "La Région sauvage" est une œuvre à la fois esthétique et hypnotique, qui use des effets spéciaux à bon escient, pour mieux provoquer un efficace effet de répulsion-fascination.

S'il pourrait apparaître au premier abord comme une parabole sur l'addiction et les dégâts de la drogue, c'est une vision plus politique qu'il semble porter en second plan, concernant le sort réservé à ceux qui décident d'assumer une certaine liberté (notamment sexuelle). Pointant l'hypocrisie des uns et le caractère collaborateur des autres, le film provoque une troublante sensation de malaise. Mais la puissance de certains plans, évoquant un appel incontrôlable, en font un objet aussi original que fascinant, récipiendaire mérité du Prix de la mise en scène au Festival de Venise 2016.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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