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MUTZENBACHER

Un film de Ruth Beckermann

Un concept rébarbatif qui met en évidence la relation de l’Homme à la sexualité féminine

En passant un casting pour un rôle dans un film de Ruth Beckermann basé sur le roman Josefine Mutzenbacher : Histoire d’une fille de Vienne racontée par elle-même, ouvert à des hommes de 17 a 99 ans n’ayant pas forcément d’expérience d’acteur, ceux-ci révèlent malgré eux leur rapport à la sexualité et à la femme…

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Josefine Mutzenbacher : Histoire d'une fille de Vienne racontée par elle-même est un roman porno daté de 1906, interdit jusqu’en 1968, et figurant toujours sur la liste des « textes dangereux pour les jeunes » jusqu’en 2017. Écrit à la première personne par un personnage féminin surnommé Pepi, prostituée depuis son plus jeune âge, il est cependant attribué par certains à l’auteur de Bambi. Avec un principe de mise en scène très vite rébarbatif, disposant un ou deux hommes (voire plus ponctuellement) sur un canapé et leur demandant leurs impressions sur le personnage féminin et son comportement, avant ou après avoir lu à voix haute des extraits du livre, des échanges plus ou moins solitaires entrecoupés à quelques reprises d’exercices de diction collectifs, la documentariste Ruth Backermann ("À l'est de la guerre") ne parvient pas moins à en tirer des détails sur la relation de chacun à la sexualité, mais aussi et surtout à la femme et son comportement.

Entre les petits rires de malaise, les dictions théâtrales, les discours réfléchis ou plus spontanés, se dessine une relation contrastée de l’Homme à certains mots, qu’ils soient affectueux ou au contraire orduriers. En les positionnant de plus face à un autre homme, voire a tout un groupe (puisque quelques scènes montrent une foule répétant les mêmes paroles), la gêne s’en retrouve augmentée, qu’elle soit pudeur ou non, notamment lorsqu’il s’agit de répéter les synonymes désignant l’organe féminin ou d’évoquer le fait de parler en faisant l’amour. Mais le plus intéressant est sans doute que transparaissent par moments la vision détournée du comportement féminin, depuis la manière cliché de draguer, jusqu’à la question du consentement ou de la position de victime. Au delà la Femme instrument décrite a quelques moments dans le texte, se dévoile une intéressante réflexion sur l’écriture elle-même, semblant « excuser les pires comportements des hommes », mais aussi la vision actuelle déformée de la sexualité due à l’accessibilité sans limite du porno, magnifiant les notions de performance et de domination. Gagnant du prix du meilleur film dans la section Encounters du Festival de Berlin, le film aura néanmoins cependant beaucoup de mal, vue sa forme expérimentale, à rallier les foules qu’il mériterait sans doute de toucher sur le fond.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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