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MOURIR À IBIZA

Petite ballade rohmérienne en trois actes

À la fin du mois d’août, Léna débarque à Arles pour rejoindre Marcus, son ancien amour de vacances. Mais comme celui-ci tarde à arriver, elle fait la rencontre d’Ali, gladiateur pour des spectacles dans les arènes de la ville, et de Maurice, un boulanger avec qui elle sympathise. Les quatre personnages vont se retrouver durant trois étés : d’abord Arles, ensuite Étretat, enfin Ibiza. Une amitié qui va passer par différents états et obstacles…

Mourir à Ibiza film movie

On annonçait plus ou moins un petit film tourné dans le même esprit que les films estivaux d’Eric Rohmer, type "Pauline à la plage" ou "Conte d’été". Un comparatif qui mérite nuance autant que prudence. Pour prendre la métaphore de l’œuf, disons que la coquille est tout à fait cohérente avec l’intention mais que le jaune de l’intérieur n’a pas tout à fait le même goût que d’habitude. Plus clairement, si la caméra met ici un point d’honneur à privilégier la captation du temps qui passe, des caractères teintés d’une douce et délicate mélancolie (toujours ce grand écart typiquement rohmérien entre la tristesse pour ce qui disparaît et la curiosité pour ce qui émerge) et des corps en contact ou en rapprochement, le scénario ne parvient pas à incarner cette fibre rohmérienne. Est-ce parce qu’il donne l’impression d’avancer sans mode d’emploi, de se croire (un peu trop) libre comme l’air, de miser sur la rupture de style pour relancer les dés de sa narration ? Un peu tout ça à la fois, on l’avoue. Et de facto, on finit par se sentir un peu largué, promené ici et là sans véritable raison tout en profitant d’une jolie ballade ensoleillée. Dit comme ça, ça a l’air paradoxal, mais en fait non.

Que le film soit divisé en trois chapitres centrés chacun sur un lieu précis ne compte finalement pas beaucoup : le nombre aurait pu être différent que cela n’aurait rien changé, de même que les trois décors ont parfois tendance à se confondre. Les personnages ne sont pas forcément mieux lotis : outre le quatuor principal, certains arrivent sans crier gare sans forcément acquérir une incidence forte (on prend pour exemple la chanteuse blonde dans le segment à Ibiza), et pour essayer de relier les points d’un scénario qui ne semble pas se revendiquer tel quel, les trois réalisateurs en herbe en viennent à jouer la carte kamikaze de la comédie musicale, laissant les personnages vocaliser sur leurs propres états d’âme – une idée qui tombe hélas un peu à plat.

L’indulgence s’impose en revanche pour les quelques coquilles techniques – on relève un mixage sonore inégal qui rend parfois certains dialogues inaudibles – dans la mesure où ce film-concept, pensé au départ comme un simple court-métrage sur un seul été, avait visiblement valeur d’apprentissage pour ses trois jeunes auteurs. Expérimenter les personnages en faisant en sorte que la mise en scène évolue en même temps qu’eux, au gré d’un processus d’écriture libre : le pari, séduisant dans l’idée, ne pouvait toutefois esquiver le spectre du résultat désordonné une fois arrivé à son terme. Cela n’en reste pas moins une curiosité qui mérite un petit coup d’œil.

Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur

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