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MADE IN ITALY

Un film de Stéphane Giusti

Made in Italy: entre nostalgie et grincement de dents

Luca Morandi, 35 ans, est un jeune écrivain en mal d'inspiration, de succès et d'amour. Le voilà parvenu à l'âge adulte sans vraiment en être un, il lorgne toujours du côté d'une enfance bénie passée en Italie, auprès d'un père fantasque, éblouissant, comme un personnage venu d’un pays fantastique. Du moins le croit-il... Lorsque ce père, chirurgien esthétique à Turin, meurt brutalement, Luca part avec sa soeur Isabella pour les obsèques. Mais l'enterrement vire au cauchemar : veuves, demi-veuves, maîtresses, nouveaux frères et soeurs, dettes à en perdre la tête, Italie "berlusconisée"... Luca redécouvre son pays d'enfance et un père mythique avec des yeux d'adulte. De la haine à l'amour, du ressentiment au pardon, Luca va redéfinir le sens de sa propre identité, de sa propre existence, réconcilier la France qui est en lui avec son Italie natale. En un mot, grandir, devenir enfin adulte…

La première scène du film était pourtant prometteuse. Glissant sur une vague fantaisiste assez décalée, l’on entrait dans un univers à la limite du kitsch, où les personnages arrêtent la circulation afin d’entonner un air italien. Mais cette note d’originalité s’arrête là, la suite du film étant surtout marquée par une avalanche de clichés. L’Italie, pays des décapotables, de la télévision «poubelle», des machos qui savent faire chavirer le cœur des femmes plantureuses et incandescentes… certes, on ne niera pas l’existence de tout cela, mais pourquoi en faire pâtir les personnages ?

Au premier abord fragiles, ils deviennent grotesques, et il est regrettable que le réalisateur ait confondu rendre hommage à son pays et se fondre dans ses plus grosses caricatures. D’autant plus que certains aspects des caractères sont plutôt bien amenés, notamment à travers des flash-backs de l’enfance du héros, dont la tendresse et la justesse sont assez agréables. Visuellement on baigne alors dans des coloris doux, une mise en scène plus lente pour mieux basculer dans les tons criards et les images rapides reflétant la situation actuelle. A noter également la prestation de Gilbert Melki, totalement confondant en écrivain italien résidant en France, oscillant entre une mise à distance de sa culture italienne et un débordement incontrôlable de cette culture transalpine.

Le plus grand intérêt du film réside dans la vision critique qu’a le réalisateur de l’Italie d’aujourd’hui, notamment l’avènement des médias au détriment de la culture italienne véhiculée entre autres par Fellini, Pavese, Ettore Scola, Vittorio De Sica (dont les références au « Voleur de Bicyclette » sont visibles dans le film). Une présentatrice télé qui ôte un vêtement à chaque bonne réponse du téléspectateur, la valeur argent prédominante dans la société italienne, des femmes objets qui refusent de vieillir, le portrait n’est pas très flatteur mais a le mérite de soulever les questions de l’identité et de la mémoire collective. Chaque caractère représente d’ailleurs une période récente de l’histoire italienne, la journaliste-terroriste, ou encore la femme excessive et «berlusconisée». « Made in Italy » est un film qui hésite entre un kaléïdoscope en hommage à ce pays et un film avec un scénario conséquent. C’est dommage, car il ne nous en reste au final pas grand-chose, à part quelques chansons…

Camille ChignierEnvoyer un message au rédacteur

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