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KANIKOSEN

Lutte des classes en lieu clos

Un homme, tremblant, le visage livide, soulève une plaque donnant sur le ponton d'un navire. Il lève alors les yeux au ciel et aperçoit une nuée de crabes en train de tomber d'une nasse. Dans les cales, un groupe d'hommes, portant chacun leur numéro, s'occupe de trier les crabes ébouillantés avant qu'ils ne terminent en boîtes de conserve...

Film bargeot et politique, "Konikosen" décrit les envies de rébellion d'un groupe d'hommes japonais, travailleurs forcenés sur un chalutiers depuis lequel ils pèchent, cuisent et conditionnent du crabe. Situé dans un contexte de guerre idéologique ou réelle entre l'empire du soleil levant et la Russie, cette parabole appuyée sur la lutte des classes est sauvée par quelques idées loufoques de mise en scène, donnant à voir les naïfs rêves d'oisiveté des ouvriers, et par une noirceur globale réjouissante.

Doté d'un humour aussi noir que les couleurs utilisées pour le décors de ce vaisseau poisseux, le scénario s'offre quelques changements de ton déstabilisants et quelques scènes délirantes. Le spectateur est d'abord surpris par les illustrations données en inserts à chacune des descriptions faites par les ouvriers, rivalisant dans la description de leur passé miséreux. Lorsque le film vire au politique, la rébellion se préparant, il s'esclaffe devant une hallucinante tentative de pendaison collective avortée pour cause de navire qui se met soudain à tanguer. Et il ne sera pas au bout de ses surprises.

Le passage, lorsque certains arrivent à s'échapper, donne lieu à une scène de danse hystérique du côté des navires russes, scène qui s'avère cependant un peu longue. Mais l'univers parano créé ici, entre esclavage moderne, motivations patriotes ou conditionnement syndicaux, donnent au film un charme étrange, légèrement désuet. Venu d'un pays où le travail est Roi, cet appel à la révolution sans leader est finalement assez perturbant.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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