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JULIETTE

Un film de
Avec

Un portrait sans profondeur ni aspérité

Pierre Godeau, dont c’est le premier film, s’efforce de dresser le portrait d’une héroïne d’aujourd’hui, et à travers lui celui d’une certaine jeunesse, qui n’est pas sans rappeler la fameuse génération Y dont les médias on tant parlé ces dernières années. Incarné par une actrice au naturel confondant (Astrid Berges-Frisbey, révélée par Daniel Auteuil dans "La Fille du puisatier"), mais dont le physique de mannequin crée nécessairement une distance, le personnage de Juliette fascine et agace en même temps. Fière, narcissique, paresseuse, un rien superficielle, elle est un peu tout ce que l’on déteste, se victimisant volontiers pour justifier sa désinvolture. Difficile, donc, d’éprouver la moindre empathie à son égard, même lorsque le film la montre mise à l’épreuve par la vie.

Abstraction faite de l’agacement suscité par le personnage, sentiment assez subjectif après tout, la vacuité qui se dégage du film n’aide pas vraiment à captiver le spectateur. Visiblement fasciné par son actrice, qu’il filme sous toutes les coutures et souvent en gros plans, Pierre Godeau peine à extraire une substance de son matériaux. Les liens qui unissent Juliette à son entourage, qu’il s’agisse de son père, de sa sœur, de sa meilleure amie et de son ex (très beaux seconds rôles tenus par Féodor Atkine, Elodie Bouchez, Nina Meurisse et Yannick Landrein), restent explorés en surface, ne s’autorisant jamais de percée émotionnelle. Les tracas de la jeune fille et ses aspirations d’écrivain, dont on se fiche éperdument, semblent eux aussi surfaits. Bref, le propos n’est guère passionnant.

Mais ce qui énerve le plus, au final, n’est pas tant l’absence de contenu que le style visuel du film, qui aligne les lieux communs du cinéma d’auteur contemporain : longs déplacements de Juliette filmée de dos dans la rue, poses lascives dans un appartement haussmannien, chansons électro du moment… Et les tentatives de créer des ruptures de style oniriques, lorsqu’il s’agit de se plonger dans les rêves de Juliette ou dans son imagination d’apprenti écrivaine, s’avèrent maladroites et paradoxalement dénuées de style ou de caractère. N’est pas Valérie Donzelli qui veut. Visiblement inspiré par les valeurs montantes de la nouvelle génération de cinéastes français (Rebecca Zlotowski, Mia Hansen-Løve), les influences du réalisateur de "Juliette" se font un peu trop lourdement sentir, donnant lieu au final à un film dénué de charme.

Sylvia GrandgirardEnvoyer un message au rédacteur

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