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L'INTREPIDO

Un film de Gianni Amelio

Une fable navrante sur le monde du travail en Italie

Un homme d'une cinquantaine d'années passe de boulot en boulot. Il est presque devenu un remplaçant professionnel. Toujours curieux de découvrir un nouveau métier, il semble prendre à ce zapping permanent, un véritable plaisir. Il faut dire que l'homme a toujours le sourire aux lèvres et tente de communiquer son envie de vivre à son fils, joueur de saxophone, tout comme à une jeune femme croisée lors d'un concours de la fonction publique...

Gianni Amelio ("L'Étoile imaginaire", "Mon frère") nous livre une fable sur le monde du travail, en mettant en scène un personnage lunaire, d'emblée présenté comme un bienheureux de l'intérim au travers des différents métiers qu'il exerce : ouvrier de chantier au vertige prononcé, animateur en supermarché, cuisinier en restaurant, poseur d'affiches, conducteur de tramway ou encore livreur. Dès le début, on ne sait pas trop si cet éternel remplaçant au grand cœur (il aide une jeune femme qui sèche à un concours administratif...) est sensé faire rire par sa simplicité ou nous émouvoir par sa générosité.

Car la fable, forcément, exagère le trait, tout en ayant ici vocation à dépeindre la dureté du milieu du travail. Ainsi Amelio illustre la férocité des patrons, pris à la gorges dès qu'on leur demande à être payé, les petites humiliations quotidiennes (le vol des pizzas, la pose des affiches à refaire...), les petits ou gros arrangements avec la morale, tout cela au nom du sacro-saint commerce... Le tout est difficilement digeste, insistant sur la nécessité pour le personnage, malgré sa galère continue, de faire le bien autour de lui.

Si au final, "L'Intrepido" semble vouloir dénoncer le caractère inexistant et vide de l'économie italienne, notamment au travers de la seule véritable bonne idée du film (le magasin de chaussures... où toutes les boites sont vides), c'est par ses quelques interrogations sur la nature du bonheur qu'il réussit à toucher, et notamment par quelques jolies scènes de complicité entre père serviable et fils révolté par son apparente passivité. Malheureusement le scénario n'évite ni les discussions de comptoir, ni les solutions faciles (et si on partait en Albanie, eux au moins ont du vrai labeur dans les mines !). Un film profondément bancal dont l'humour est par moments particulièrement indigeste (voir les réflexions sur la faim, la scène des prothèses blanches pour Africains noirs, ou la description du fait de « tomber amoureux »).

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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