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L'HUMOUR À MORT

Un rappel nécessaire mais sans assez de recul

Le 7 janvier 2015, la rédaction de Charlie Hebdo fut victime d’une attaque terroriste qui coûta la vie à douze personnes. Le début d’une série d’événements qui résonnèrent comme un avertissement…

Bien entendu « L'humour à mort » est un documentaire qui devait voir le jour. D'abord parce qu'il était nécessaire de ne pas laisser dans l'oubli cette horrible journée (suivie de deux autres événements tragiques les 8 janvier – l'assassinat d'une policière-, et le 9 janvier – la prise d'otage de l'Hyper Casher), qui réveilla les consciences de nombreux Français. Ensuite parce que loin d'un simple soutien financier à cet hebdomadaire trublion, il était indispensable d'entendre les survivants, témoins de l'abject, pour mieux comprendre la menace sur la liberté d'expression.

Choisissant, après quelques images des fameux événements, de conter la menace grandissante sur Charlie Hebdo, avec l'épisode des caricatures de Mahomet en 2007, le film raconte les pressions successives (plus de 900 mails de demande d'excuses, le procès, l'incendie volontaire de 2011, les menaces sur Charb...), tout en esquissant le plus grave et dangereux : le silence du reste de la presse, et la complicité sourde qui se dessine. Dénonçant la frilosité de la presse, en demandant en contraste avec les jours suivants le drame « Ils étaient où avant ? », les auteurs proposent en voix-off un ton par moment un peu trop « revendicatif » qui sied mal à l'hommage.

Reste que les témoignages des survivants sont poignants, notamment celui de Coco, qui fut forcée d'ouvrir les portes aux assassins et de les accompagner jusqu'à ses collègues. Derrière cela c'est la peur même des mots qui est pointée, comme celle de désigner la dernière prise d'otages comme un acte antisémite, car désignant par nécessairement par ricochet la communauté musulmane. Avec un certain tact, « L'humour à mort » décrit des événements si proches, qui paraissent paradoxalement si lointains, par rapport aux récents événements (les attentats de Paris en date du 13 novembre 2015). Un défaut certes non inhérent au film lui-même, mais qui le fait apparaître à la date de sa sortie, comme très auto-centré, et donc manquant quelque peu de recul. Dommage.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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