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ETHEL AND ERNEST

Ce film est un long fleuve tranquille

Ethel et Ernest sont deux Londoniens ordinaires qui tombent amoureux peu avant que le 20e siècle ne vive soudain de nombreux changements sociaux tels que la Grande Dépression, la Seconde Guerre Mondiale ou l’austérité d’après-guerre. Quarante années de changements pour un amour qui sera resté intact et tenace, et dont leur fils, Raymond, se souvient…

Pour la petite histoire, l’une des œuvres de l’auteur anglais Raymond Briggs, "Quand souffle le vent", fut adaptée en 1987 par Jimmy T. Murakami et obtint le Grand Prix à Annecy en 1987. S’il n’aura pas récolté la même récompense lors de son passage en compétition d’Annecy en 2017, "Ethel & Ernest" n’aura toutefois pas manqué de marquer les esprits par sa douceur, sa subtilité et son humanisme à fleur de peau. Tourné dans un graphisme 2D tout à fait fidèle au trait épuré de l’artiste (avec cela dit quelques ajouts de 3D très efficaces et jamais gratuits), le film se veut un hommage de ce dernier à ses propres parents, de leur rencontre jusqu’à leur mort en 1971, au plus près de leur quotidien et des sentiments qui les animent. Le film brasse de nombreux enjeux sociaux (voire politiques, si l’on en juge par les opinions opposées des deux héros) pour étoffer cette belle romance, mais les utilise avant tout comme toile de fond, attaché qu’il est pour ces deux personnages auxquels on s’attache au fur et à mesure qu’on les voit vieillir.

Avec un rare humanisme (aucune propension à la caricature ni rejet de la nuance), Roger Mainwood procède de manière simple et fluide, par une ligne claire graphique mais sans effet de style ostentatoire, comme pour mieux refléter l’écoulement d’une existence. Avec néanmoins un gros plus à relever du côté du scénario : deux personnages à l’amour indéfectible qui assistent à distance à la transformation d’un monde qui avance trop vite par rapport à eux. Cela ne fait que rendre plus intense la solidité de leur amour, sans jamais verser du côté du pamphlet réac ou du pathos facile. Saupoudré d’un humour discret mais efficace, "Ethel & Ernest" se passe finalement d’analyses et de commentaires par la dignité de son traitement : touchant sans paraître remuant, sensible sans verser dans la sensiblerie, émouvant sans jamais lorgner du côté du tire-larmes. Un vrai drame qui vise juste et où les larmes surgissent en douceur, à la manière d’un long fleuve tranquille.

Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur

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