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ELLES DANSENT

Un film de Alexandre Messina

Quand sert la danse…

Aude est danseuse. Sa scène n’est pas habituelle : les couloirs et chambres d’un hôpital. Son public : des personnes atteintes de cancer…

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Au début, en voyant cette danseuse en tenue de fée faire des chorégraphies un peu éthérées dans les couloirs d’un hôpital, on peut avoir la même impression qu’un des ambulanciers : « C’est perché, quand même ! » On peut aussi avoir la même sensation que la co-autrice du documentaire, Laetitia Bertheuil, qui avoue elle-même, face caméra, que l’idée d’une danseuse évoluant non loin de personnes mourantes la « révulsait » au début du projet !

Pourtant, le constat est vite là : malgré l’incongruité apparente, ou le risque d’intrusion et d’indécence, la magie opère et la surprise génère du positif. Toujours à la recherche d’un délicat équilibre, faisant face à des défis humains (comment prendre en compte l’intimité de chaque personne et trouver les limites adaptées à chaque cas ?) mais aussi techniques (notamment des problèmes d’acoustique), Aude déambule dans les couloirs et les chambres pour apporter des respirations salvatrices et faire naître des sourires là où on ne s’attend pas à en voir.

De l'émotion pure surgit de ces situations artificielles et on constate que cette initiative apporte du réconfort à la fois pour la patientèle et pour les équipes soignantes. « Je suis ravie que ce lieu dit "de mort" soit un lieu de vie », s'enthousiasme par exemple une cadre de santé, alors que d’autres font quelques pas de danse avec Aude, le temps d’une mini-pause dans leur travail (on imagine sans peine le supplément de motivation que cela insuffle alors). Finalement, on peut se dire que ce n’est ni plus ni moins qu’une version adulte des clowns intervenant dans les services pédiatriques.

Si ce documentaire peut décevoir pour sa qualité formelle (flous, surexpositions, cadres instables…) ou pour sa structure (l’insertion des séquences hors hôpital n’est pas très adroite), il ouvre une fenêtre humaniste plus que salutaire. Voir ce film dans le contexte pandémique actuel lui donne même encore plus de puissance, notamment quand, le temps d’une courte séquence durant laquelle Aude enfile blouse, gants et masque pour entrer dans une chambre, on prend brutalement conscience de ce que nous perdons sans les contacts physiques et les visages apparents !

Que ce soit lors des intervenions d’Aude en hôpital ou dans les cours qu’elle dispense auprès de femmes ayant besoin de redonner un sens à leur corps (au passage, on conseillera, en écho à ces scènes, de regarder sur Netflix l’étonnant "Pole dance : haut les corps !"), il est question d’un lâcher prise et d’un partage sans complexe, que la danse parvient à favoriser. L’effet cathartique de l’art est une fois de plus mis à l’honneur grâce à ce documentaire. Pas de doute : on a plus que jamais besoin de danse, de musique, de cinéma, de littérature, de peinture…

Raphaël JullienEnvoyer un message au rédacteur

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