Bannière Reflets du cinéma Ibérique et latino américain 2024

DREAM BOAT

Derrière les apparences

C'est devenu presque une tradition : chaque année, des milieux d'homosexuels embarquent sur un bateau de croisière, histoire surtout de faire la fête presque non-stop, et de rencontrer d'autres hommes...

Avec ce documentaire coproduit par Arte et sortant aux environs de la Gay Pride parisienne, c'est à une peinture douce-amère des croisières gays que l'on assiste, loin de s'attarder sur les excès liés au sexe, à la drogue ou au culte de l'apparence physique. Ces sujets, s'ils ne sont pas éludés, sont fort judicieusement relégués au second plan, évoqués oralement, lors d'un bref passage en salle de musculation ou par quelques plans de lendemains de soirées où le sol jonché de détritus aligne quelques capotes usagées. N'en déplaise aux adeptes des reportages racoleurs ou voyeuristes, "Dream Boat" n'est rien de tout cela.

Car c'est sous l'angle de 5 portraits d'hommes de nationalités et conditions différentes, que le film tente d'aborder, avec un certain tact, les rapports à la famille, la religion et l'éducation, l'affirmation de soi, la peur de vieillir, la recherche de l'amour, le SIDA... Avec une certaine distance, on navigue entre les coups de déprime d'un Polonais habitant en Angleterre, d'un photographe autrichien séropositif, d'un Français en chaise roulante, d'un Palestinien ayant immigré en Belgique, et d'un Indien installé à Dubaï. Entre deux soirées déguisées (des plus incroyables) chacun raconte ses obstacles, ses rêves, ses doutes, avec plus ou moins de naïveté ou de lucidité.

Le metteur en scène, qui a opté pour une mise en sourdine de la musique de cette boîte de nuit permanente, apporte quelques pauses bienvenues dans ce discours multiforme, par des images sereines de fins de soirées ou de pontons désertés. Il propose aussi des moments où sa caméra flotte entre deux rangées d'hommes torses nus, apportant ici d'autres visages et d'autres voix, en guise de conclusions plus ou moins cruelles sur certains sujets (la coupure avec la famille, le rapport au physique...). Et il ressort au final de ce voyage, en parfois étrange compagnie, un sentiment de communauté faussement rassemblée, où chacun trace sa route comme il peut, avec une carapace plus ou moins épaisse.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

Laisser un commentaire