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LES CARTES DU MAL

Mange tes cartes et tais-toi !

Pour fêter l’anniversaire d’une de leurs amies, une bande de copains décident de louer une maison à la campagne. Alors qu’il ne reste plus qu’une bière à boire, l’un d’eux trouve un vieux jeu de Tarot. C’est alors qu’ils se prêtent à l’expérience et alors que ça ne pourrait être qu’une occupation anodine, ils vont vite remarquer que quelque chose de maléfique possède les cartes. La petite troupe va devoir alors affronter le destin dicté par le jeu, à moins qu’ils n’arrivent à en réchapper à temps…

À la lecture du synopsis ci-dessus, avez vous écarquillé les yeux ? Non vous ne rêvez pas, le jeu traditionnel et multi générationnel de Tarot se voit adapté en film d’épouvante. Ce n’est pas une démarche nouvelle de la part des studios d'adapter des jeux de sociétés en films. La bataille navale ? Ils l’ont fait avec le charmant blockbuster débilo "Battleship" en 2012 de Peter Berg. Le cluedo ? Oui oui bien sûr et c’était en 1985 par Johnathan Lynn. Et Monopoly est prévu pour l’année prochaine. On pourrait se croire dans un Kamoulox, mais on vous assure que non. Et même si l’idée d’adapter le jeu de divination en film d’horreur avait de quoi prêter à sourire, nous sommes toujours preneurs d’une éventuelle surprise derrière.

Malheureusement pour nous, nos espoirs sont vite réduits à néant dès les premières 15 minutes du film, qui servent bien entendu à l’exposition de cette bande de potes, ainsi qu’à l'élément déclencheur de l’intrigue. Premièrement, on ne croit pas une seule seconde à ce groupe d’amis qui n’ont pas l’air de si bien se connaître et l’ambiance installée pendant la séance de tirage de cartes est quasi inexistante. Cela part donc mal : le film commence à peine et fait preuve du minimum syndical à coup de champs contre champs, pendant 10 longues minutes. Les pires travers sont déjà mis en place et pour une recette réussie il faut absolument des personnages inconsistants avec une alchimie artificielle que le film ne prendra jamais le temps de développer. Ceci malgré les 80 minutes au compteur pour le faire.

Seule Haley, la seule et unique capable de lire les cartes, se détache du groupe mais ce n’est pas pour nous surprendre. Elle aura surtout la carte scénaristique d’immunité en sa possession en compagnie de son ex petit ami. On greffe à Haley une semi back-story avec un trauma enfoui qu’on ne ré-utilisera qu’une seule fois, le temps d’un plan d’une seconde, en délaissant les autres personnages, réduits à leurs archétypes classiques. Donc non, "Les cartes du mal" ne cherchera en aucun cas à déroger de ce qu’il se fait de pire dans le genre depuis plus de deux décennies. On en vient à penser à l’horrible "Ouija" en 2014 de Stiles White et on constate que rien n'a bougé en 10 ans, il y a de quoi avoir le bourdon.

Et même le ressort dramatique qui voudrait singer des modèles plus réussis (on pense évidemment à la saga "Destination Finale") que le film met en place avec ses morts qui se succèdent en fonction des prédictions, n’a rien d’excitant. Que ce soient les morts pour lesquelles on évite à tout prix de montrer de la violence graphique, malgré le sadisme des pièges, ou le fait pur et simple qu’on dormait déjà pendant la séquence où chaque destin est énoncé, le film oublie d’en être même ludique. On ne joue ni avec notre attente ni avec notre échine, mais beaucoup plus avec les bijoux de famille tant nous avons à faire à du contenu et non plus un film. Vous savez, ce que les studios et plateformes veulent nous vendre comme consommable dorénavant. Des choses filmiques interchangeables au possible qui n'essayent même plus de paraître autre chose. Du contenu, toujours plus de contenu pour donner la sensation de satiété au consommateur sans se soucier qu'au fur et à mesure que cette notion rentre dans notre quotidien et notre langage, on redéfinit à force les contours de cet art qu’est le cinéma. Quitte à en changer sa nature, pour toujours. Payer son billet d’entrée pour ce genre d’ignominie devient sans doute une question à se poser.

Germain BrévotEnvoyer un message au rédacteur

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