UN P'TIT TRUC EN PLUS

Un film de Artus

Une comédie inclusive particulièrement tendre

Alors qu’ils viennent de braquer une banque, La Fraise et son fils Paulo, quittent leurs masques et vêtements dans une ruelle et pressent le pas vers leur voiture. Mais comme ils avaient garé celle-ci sur une place handicapés, juste devant un centre spécialisé, elle a été emmenée par la fourrières. Ils s’incrustent alors dans le bus du centre, La Fraise se faisant passer pour éducateur et Paulo, à sa demande, pour un handicapé prénommé Sylvain. En route pour quelques jours dans un gîte rural, avec le magot dans leurs sacs, ils espèrent pouvoir échapper à la police…

Premier long métrage en tant que réalisateur d’Artus, qui s’offre ici en même temps le rôle principal, "Un P’tit truc en plus" est une comédie réussie, abordant avec un humour mordant et tendre les différences, qu’il s’agisse de handicap, de surpoids ou d’excès de timidité. On était déjà heureux de découvrir l’homme en tant qu’acteur dans des comédies généreuses et fédératrices, comme le sympathique "Si on chantait", ou dans des rôles mémorables comme le médecin légiste de "38°5 Quai des orfèvres", le voici qui nous livre un scénario sur le fil du rasoir, concoctant face à deux personnages différemment ouverts aux autres, une bande aussi surprenante qu’attachante.

Car de regard sur l’autre il est ici question, derrière les phrases qui blessent, qu’elles viennent du côté sans filtres des pensionnaires (« il le sait qu’il est gros » lâche Alice à propos de son collègue Marc, amoureux d’elle, alors qu’on vient de le désigner comme tel), ou de l’égoïsme d’un père (Clovis Cornillac, très bon) qui n’a comme objectif que de se barrer d'ici au plus vite (« à la vitesse où ça se déplace, ça doit pas être bien loin » à propos d’un fan de foot dont il a envoyé le ballon dans les bois voisins et qui s'est égaré à sa recherche). De quelques moments de gêne, le scénario nous conduit vers une richesse de personnages ayant pour certains un recul surprenant sur eux même (la scène d’apprentissage du « parler » pour paraître handicapé est un régal) ou sur leur comportement (le chantage est un réflexe parfaite acquis et conscient...), ou au contraire prisonniers de leurs tocs ou phobies.

L’équilibre du film vient sans doute du fait que dans ce petit groupe, où l’on trouve un gars qui crie joyeusement « enculé » a tout bout de champs, un autre déguisé en Supergirl (puis notamment en bouteille de ketchup...), un qui parle tout le temps à la manière d’un Sarkozy théorisant et envahissant, un plus collant que les autres, les intrigues sont finalement traitées avec la même importance que celles entre les éducateurs. Ceci d’autant plus qu’Artus situe finalement son personnage à mi distance entre les deux groupes, séduit par la fameuse Alice (Alice Belaïdi, formidable), mais réapprenant à écouter ses aspirations malgré un père dirigiste, grâce a la simplicité des relations ou réactions des pensionnaires. Une comédie généreuse, au casting en partie amateur, qui fait forcément penser a "Campeones" de Javier Fesser, énorme succès en Espagne et remaké en France sous le même titre ("Champions"), le sport en moins, mais un peu de finesse et la profondeur en plus.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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