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CRACHE COEUR

Un film de Julia Kowalski

Crève-coeur

Rose, une jeune lycéenne assez impulsive, rencontre un ouvrier polonais que son père a engagé pour effectuer des travaux dans sa maison. Un jour, elle apprend que cet ouvrier recherche son fils, qui vit en France. Mais Rose connaît ce « fils » : il s’agit d’un garçon de sa classe, véritable forte tête du quartier, dont elle est secrètement amoureuse. Ces trois personnages vont dès lors se croiser et se chercher, entre la France et la Pologne…

Ce n’est pas forcément qu’on commence à en avoir un « sadoul » des premiers films de réalisatrices françaises centrés sur l’éveil amoureux et sexuel d’une jeune fille, mais à force d’en avaler deux ou trois par an, la recette finit par tourner au vinaigre. On va même finir par se demander si la tentation autobiographique – tantôt avouée tantôt refusée – de ce genre d’histoire devrait être lue comme une sorte de « première fois », illustrant métaphoriquement la naissance concrète d’un « auteur » (on insiste sur les guillemets) par le biais abstrait d’une jeune héroïne de cinéma. Ce niveau de lecture, que l’on devrait en soi imaginer stimulant et enrichissant, est très vite devenu lassant puisque que les films en question n’ont de cesse que de ressasser les mêmes ingrédients sans proposer de nouvelles perspectives. Pour une "Naissance des pieuvres" magnifique et audacieuse, combien de duplicatas naturalistes sans nouveauté ? "Crache cœur" ne déroge pas à la règle, offrant une nouvelle perspective ronflante du désir féminin dans un paquet-cadeau emballé avec un vieux papier peint.

Le simple fait de retrouver Valérie Donzelli et Jérémie Elkaïm comme producteurs de la chose n’est même pas étonnant : leur cinéma de hipster infantile à la Serge Bozon, aussi prétentieux dans ses choix esthétiques que profondément timide dans ses audaces filmiques, trouve ici un nouveau rejeton, plutôt mollasson à défaut d’être réellement déplaisant. Entre des cadres monomaniaques qui transpirent l’économie d’idées et des couleurs maussades à fond dans la grisaille branchouille, on a plutôt envie de se tourner les pouces. Le seul intérêt de ce film réside dans le tempérament de sa jeune héroïne, joyeusement têtue et bornée, qui prend tous les chemins de traverse pour atteindre son double objectif – cela offre au moins une dynamique intéressante à la narration. À part ça, un peu de flûte traversière par-ci (ça ne sert pas à grand-chose), un peu de réseaux sociaux par-là (il ne suffit pas de les utiliser dans son scénario pour se prétendre « moderne »), des dialogues pas toujours bien écrits, et une dernière demi-heure polonaise qui tourne en vain autour du pot. Un film « crève-cœur » ? Mouais, pas loin...

Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur

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