LES CLIMATS

Un film de Nuri Bilge Ceylan

Une photo sublime pour des sentiments en état d'hibernation

Les vacances d’un couple turc, dans une région ensoleillée, vont faire empirer leur relation, jusqu’à provoquer la rupture…

Avec « Les climats », Nuri Bilge Ceylan, réalisateur du remarqué « Uzak » nous donne à voir les dernières heures d’un couple, tout aussi émouvantes que douloureuses. Partis en vacances pour se ressourcer, l'homme et la femme peinent à communiquer et finissent par se déchirer. Mais alors qu'elle se détache, lui tente de revenir sur les traces de leur amour passé. Ainsi, après avoir opposé dans un premier temps, vacances ensoleillées et pourtant signes de malheur, contre voyage dans des contrées glacées et sentiments en état d'hibernation, l'auteur pose surtout la question de la possibilité d’une relance d’une relation amoureuse, pour de bonnes ou parfois mauvaises raisons. Il questionne l'amour et le regret.

Dans cet exercice ses deux interprètes s'avèrent subtils et proprement dirigés. Il faut dire qu'il s'est lui même donné le premier rôle, et a accordé celui de sa femme... à sa véritable compagne dans la vie. Ce que certains qualifieront ici d'impudeur se transforme pourtant sous nos yeux, en de belles envolées. Lui est nonchalant, et porte une tristesse dans le regard, montrant toutes l'incertitude de ses sentiments, entraînant le retournement de situation dû à la jalousie, au fait de voir que l’autre commence à revivre, sans vous… Ainsi, toute la complexité de l’homme face au désir de la femme se lit dans les yeux des deux acteurs, formidables.

Tout au long du film, à l’aide de cadrages d’une maîtrise et d’une beauté confondantes, le metteur en scène marque en même temps un contraste fort entre paysages sublimes et sentiments moribonds ou éteints. Il nous balance, comme ses personnages, entre luminosité des cotes, et neige dans les terres, entre chaleur et froid, ou vie et mort des sentiments, entre beauté et laideur de l'autre et de ce qui l'entoure. Ses ciels orageux, ses poses devant des paysages sublimes, pénètrent irrémédiablement la rétine du spectateur. "Uzak", qui était l'un des deux favoris pour la dernière Palme d'Or, est finalement reparti bredouille du Festival de Cannes: une belle injustice.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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