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CETTE FEMME LA

Un film de Guillaume Nicloux

Elégant et inquiétant, le nouveau film de Guillaume Nicloux offre un rôle en or à Balasko

La capitaine de police Michèle Varin (Josiane Balasko) se retrouve à enquêter sur une mystérieuse prostituée, retrouvée pendue au cœur d'un bois. Entre ses collègues, sa vie privée quasi inexistante et deux affaires pas très jolies, elle doit faire face au souvenir de son petit garçon, décédé un 29 février…

De plus en plus noir. Ainsi vont les films de Guillaume Nicloux, qui après Une affaire privée, réalise un nouveau polar, prétexte une nouvelle fois à un portrait intimiste d'un être en déprise sociale. Après Thierry Lhermitte, dont on retrouve ici le personnage d'enquêteur privé, c'est la capitaine Josiane Balasko qui s'ouvre à nous, donnant à voir ses peurs les plus intimes au travers d'un malin montage, mêlant rêve et réalité. Car plus le film avance, moins le spectateur conserve de repères, jusqu'à finir par se demander si certains personnages existent vraiment.

Entre les entretiens chez le psychologue, les endormissements quasi imperceptibles, les réveils qui n'en sont pas, et les disparitions successives, ce sont les peurs du personnage qui se matérialisent, et certaines volontés qui s'inversent. Si la mère voulait sauver son enfant, c'est ici ce dernier qui la sauvera peut être. Mais ce sont surtouts les méandres de la vie mi-privée de la policière qui sèment le doute, et semblent ainsi symboliser ses désirs, et plus ses craintes. L'amourette avec Frédéric Pierrot n'est elle pas qu'un fantasme ? Et que penser des diverses propositions ou regards d'envie que lancent ses collègues à cette femme pourtant fortement décrépie et déprimée ?

La mise en scène de Guillaume Nicloux, tout en mouvements millimétrés et travellings avant inquiétants, confine à l'hypnose, et ne laisse jamais entrevoir les moments de basculement. Comme si le spectateur s'assoupissait en même temps que l'héroïne. La pluie presque incessante, les inquiétants personnages secondaires et les travellings très lents sur des décors glauques au possible finissent de confectionner un univers mental poussiéreux, et oppressant à l'image d'une vie qui s'est arrêté à un instant t, et qui n'a jamais réussit à redémarrer. Balasko trouve en cette femme-là un rôle à sa mesure, nous rappelant l'actrice formidable et subtile qu'elle peut être, sortie des comédies à la française. Son regard de chien battu et la tristesse infinie qui s'en dégage laissera une empreinte indélébile dans la galerie des personnages forts de l'année.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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