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CALL ME BY YOUR NAME

Un film de Luca Guadagnino

Il y a parfois des soleils…

A l’été 1983, la famille Perlman, dont le père est un célèbre spécialiste de la culture gréco-romaine, accueille pour six semaines un jeune Américain, dans sa grande demeure du nord de l’Italie. Ce dernier partage la même salle de bain que le fils de la famille, une complicité étrange naît rapidement entre eux, teintée d’une certaine admiration…

On avait quitté Luca Guadagnino sur les élans hystériques de Ralph Fiennes dans l'improbable remake de "La piscine" intitulé "A Bigger Splash". Revoici le réalisateur du très remarqué "Amore" en pleine forme, aidé dans la maîtrise de son sujet par un James Ivory ("Chambre avec vue", "Retour à Howards End") inspiré, qui signe ici un scénario aussi délicat que bouleversant sur les affres d’un premier amour.

Dressant le portrait d'un jeune homme dont la vie sera transformée à jamais par l'apparition d'un homme un peu plus âgé, sûr de lui, aussi séduisant en diable qu’il semble désinvolte. Le temps d'un été c'est justement la fascination exercée par ce dernier sur tout son entourage qui intéresse le réalisateur, montrant à la fois l’intelligence, l’imposant charisme, la nonchalance affichée et parfois l’apparente arrogance de ce personnage, brillamment interprété par Armie Hammer ("Agents très spéciaux : code UNCLE", "Nocturnal animals"). Face à lui, c’est une famille multilingue qui imprègne la totalité du film de son charme et sa vitalité, parlant italien (comme le père, Michael Stuhlbarg, fort juste, et présent dans la scène la plus déchirante du film), français (comme la mère, rassurante Amira Casar), ou anglais, avec leur troublant invité. Ce dernier, bon vivant, vient immiscer un éclat de vie dans cet univers ensoleillé et rappelle que l’on croise parfois des soleils, au contact desquels la brûlure n’en est que plus vive et persistante.

Bercé dans une lumière d’été presque insolente, le film se pare ainsi d’élans érotiques propres à une jeunesse insouciante, depuis des gestes languissants qui traduisent l’attirance, jusqu’à des derniers outrages que l’on fait subir à un fruit devenu symbole : une pêche. Déchirant autant qu'enchanté, le film s'avère une belle chronique de l'approche amoureuse, convoquant ses hésitations, ses erreurs d'interprétation, ses élans parfois brimés. "Call me by your name" est donc une vraie réussite, découverte dans la section Panorama du Festival de Berlin 2017, dont le scénario rappelle avec subtilité qu’il convient de ne manquer aucun moment de bonheur, afin de « ne pas être sec à 30 ans », ne serait-ce que pour se souvenir de « sentiments qu’on souhaiterait (un jour savoir) ressentir à nouveau ». Une œuvre qui vous promet de finir la projection, comme l’un des personnages... les yeux embués.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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