BAD GRANDPA

Un film de Jeff Tremaine

Une certaine idée de l’horreur (et non de l’humour)

Suite au décès de son insupportable épouse et à la cavale de sa fille dealeuse de drogue, le vieux Irvin Zisman, âgé de 86 ans, se retrouve avec son petit-fils Billy sous le bras. Il se lance alors dans un voyage jusqu’à l’autre bout du pays, espérant ainsi renvoyer cet imprévisible gamin de huit ans chez son père. Mais en chemin, les surprises vont se multiplier…

On ne pensait pas être capable de voir un truc pareil débarquer dans les salles. Non pas que l’on soit blasé avec l’âge sur les effets de l’humour pétomane sur notre cortex (quand c’est bien exécuté, ça marche toujours), mais atteindre un tel niveau de renoncement cinématographique au profit de gags plus éculés que celui de la peau de banane s’avère très inquiétant. Sans compter que le concept, sensé être basé sur une forme toujours plus accrue de vulgarité rentre-dedans, tutoie surtout le fond des cabinets en terme d’inventivité trash. Ayant visiblement laissé de côté pour l’instant le masochisme assez jouissif que lui et sa bande de cinglés laissaient éclater dans "Jackass", Johnny Knoxville s’est donc lancé dans le déguisement outrancier en incarnant ici un vieillard libidineux, grossier, irrévérencieux et foncièrement antipathique. Bon, le maquillage est juste raté de A à Z, ce qui fout déjà en l’air sa prestation d’acteur, mais honnêtement, le pire, ce n’est pas encore ça.

On pourrait tartiner des phrases entières sur ce qui rend "Bad Grandpa" raté, consternant à tous les degrés de fabrication et profondément ennuyeux jusqu’au bout, mais ce serait se limiter à paraphraser l’intégralité des scènes (une lecture du synopsis sera amplement suffisante). Faisons donc simple et rapide : les gags ne dépassent jamais le stade du pipi-caca-prout le plus basique (entre une violente diarrhée sur les murs et des testicules de retraité coincées dans un distributeur de boissons), chaque tentative d’humour s’échoue lamentablement à cause d’une mise en scène inexistante, la subversion est absente quand elle ne dérive pas vers la pire des obscénités (voir le final qui tente de pervertir n’importe comment celui de "Little Miss Sunshine") et pas un seul vrai plan de cinéma ne se dégage de l’ensemble. On sent ici l’omniprésence du découpage télévisuel, renvoyant au vestiaire toute notion de cinéma et d’esthétique (l’image est d’une laideur pas possible) au profit d’un désir d’immédiateté dans le filmage, lequel n’empêche évidemment pas le relâchement en termes de mise en scène. Et du coup, sans le moindre investissement devant et derrière la caméra, on récolte juste le degré zéro de la comédie trash. Inutile d’en dire plus.

Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur

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