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A VERY BRITISH GANGSTER

Un film de Donal McIntyre

Incroyable mais vrai

La famille Noonan est un des clans les plus dnagereux mais aussi les plus réputés de Manchester. Le réalisateur suit Chris, père homosexuel de 49 ans, dans ses combats contre le système et la justice, comme dans ses actions de solidarité avec ses congénres...

Le documentariste de la BBC Donal McIntyre a choisi d'observer la plus puissante famille de la pègre locale de Manchester. Axé sur le personnage de Dominique Noonan, chef de clan bedonnant au visage de poupon, son reportage nous montre comment ce parrain bien connu des services de police, réussit à déjouer les accusions contre lui et à passer pour un bienfaiteur des petites gens de banlieue. Ayant passé 22 ans au total en prison, n'ayant connu son fils le plus âgé (11 ans) que durant 2 ans au total, Noonan apparaîtrait presque comme un personnage attachant et inoffensif, si le réalisateur ne glissait régulièrement quelques commentaires sur les agissements mafieux (racket, violences, assassinats...) qui sont le quotidien de cette famille, remarquablement structurée.

Car à partir de ce portrait unique, occasion de dialogues hallucinants, le réalisateur montre le recul amusé des protagonistes par rapport à des actes de meurtres ou de vol commis par le passé. Ainsi les deux frères, l'un parrain, l'autre tueur à gages accroc au crack, se jouent des surveillances permanentes d'une police dans l'embarras, d'une justice dont ils se vantent à demi-mots de soudoyer les jurés, et se plaisent à jouer les assistantes sociales ou les médiateurs. Entourés par bon nombres de criminels en herbe, leur monde ne fait cependant guère rêver, malgré un projet de monter leur propre poste de police privé, comprenant une partie faisant office de banque, dont on se pose forcément la question de la légalité.

Pour sortir ponctuellement d'un ton humoristique qui porte à rire jaune, le metteur en scène confronte régulièrement aux exactions des adultes, les rêves de deux enfants, celui de Dominique Noonan et un autre. L'un voudrait faire du sport son métier et l'autre réussir dans la chanson. Il chante d'ailleurs lors des fêtes d'acquitements et des incroyables funérailles que le clan s'organise après chaque décès non accidentel. Ces rêves, qui étonnemment ne sauraient être finalement différents de ceux des autres garçons de leurs âges, s'avèrent donc touchants. Accompagnées de mouvements de grues incroyables, qui donnent des plans surréalistes sur des lieux en déshérence (canaux, friches industrielles...), que McIntyre utilise savamment en addition au grand angle, ils font ressembler son film à d'improbables cases de bande dessinée aux planches savamment travaillées.

Ce qui frappe le plus au final, c'est l'incapacité de la police à coincer ce vilain garçon pour autre chose qu'une simple détention d'arme à feu. Le jeu du chat et de la souris, ou ici du gendarme et du voleur, prend avec ce documentaire tout son sens, aussi cynique soit-il. Et les meilleurs moments du film, les plus drôles en tous cas, se résument en les quelques fêtes de famille, organisées en l'honneur du retour des acquittés, lors desquelles tout le clan entonne en choeur des chansons raillant la police, prison et justice. Si la vie de gangster est une fête, la fin, non prévue initialement dans le film, vient nous rappeller qu'elle n'est pas forcément si drôle que cela.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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