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Berlin 2014

Berlin 2014 - Bilan : Maturation et passage à l âge adulte

64ème Festival de Berlin – Berlinale 2014
du 06 au 16 février 2014
Berlin – Allemagne

C'est du côté de la tradition que se place le film turc "The lamb", découvert dans la section Panorama. Il conte l'histoire d'un petit garçon, auquel le père n'a pas les payer un mouton pour la fête de circoncision, vacillant entre tentations diverses et volonté de conserver l'honneur de sa famille, le père se soucie finalement peu du gamin. Le scénario quant à lui, développe avec délicatesse la paranoïa du gamin, persuadé par sa sœur qu'il va être lui-même sacrifié, en alignant comportements et phrases qui sèment encore plus le doute dans son esprit. Un délicieux parcours initiatique pour le fils, comme pour le père, qui découvre ici ses responsabilités.

Dans le passage à l'âge adulte, le rôle de l'éducation est également primordial. Ainsi, la volonté d'un père qui vous emmène voir des prostituées pour vous initier aux choses de la vie, peut être prise comme une intention louable, mais confirmer ainsi l’écœurement d'un adolescent déjà en manque de repères ("La tercera orilla"). Dans le magnifique "The better angels", ce sont des préceptes de respect de tout être vivant, et d'éducation par le labeur qui fonderont la personnalité du futur président des États-Unis, Abraham Lincoln. Réalisé par le directeur de la photographie de Terrence Malick, le film est un délice de poésie, aussi enivrant qu'esthétiquement réussi.Mais la vrai surprise de ce festival de Berlin 2014, est venue de l'expérience menée par Richard Linklater sur près de 12 ans. Tourné à raison de quelques semaines chaque année, "Boyhood", qui lui a valu le prix de la mise en scène, suit un gamin depuis l'âge de 7 ans jusqu'à son entrée en fac, effleurant les événements qui le feront grandir. Sous nos yeux, et ceux de parents fiers de ce qu'ils ont pu apporter, se forme une personnalité de jeune adulte, dans un film d'une remarquable sensibilité.Mais le passage à l'âge adulte passe aussi souvent par une forme d'affirmation de soi, envers et contre tous, et surtout souvent contre ses propres parents. C'est le cas de l'héroïne de "Supernova" qui exprime dans la section Generation, en pensées, tout le mépris qu'elle éprouve pour ces derniers, alors qu'elle cède peu à peu aux tentations environnantes. Le principe, sensé créer le comique en décalage avec les situations, fonctionne seulement un temps. C'est le cas aussi du personnage du fils (Cillian Murphy) dans le remarquable "Aloft" de Claudia Llosa, embarqué dans une recherche de cette mère qu'il hait par une journaliste un peu trop curieuse (Mélanie Laurent). L'occasion de dévoiler peu à peu les raisons d'un éloignement et d'interroger avec finesse la capacité de chacun à pardonner, et la possibilité de guérir de ses blessures.

L'affirmation de la différence est aussi parfois nécessaire, notamment lorsqu'elle touche à la sexualité. C'était le cas cette année dans "Land of storms", où un jeune homme se confronte à une communauté qui voit en lui une source de perversion, mais aussi dans le Teddy award 2014, le film brésilien "The way he looks" où un jeune aveugle découvre son inclinaison pour les garçons, auprès d'un camarade de classe. Un film tout en nuances, beau comme l'été, dans lequel souffle un beau vent de courage et de liberté.Mais parfois c'est aussi l'inverse. À force de vouloir trop embrasser les règles de vie de ses parents, c'est finalement l'influence néfaste d'une religion ou d'une communauté qui se fait ressentir. Il en va ainsi dans le percutant "Kreuzweg", où une adolescente s'impose étape par étape, un véritable chemin de croix, en suivant des préceptes à la lettre. Une descente aux enfers terrifiante car des plus clinique, qui enfonce le clou au passage quant à la responsabilité aveugle des parents.

Olivier Bachelard Envoyer un message au rédacteur