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Berlin 2014

Berlin 2014 - Bilan : Conflits en tous genres

64ème Festival de Berlin – Berlinale 2014
du 06 au 16 février 2014
Berlin – Allemagne

Si l'on parle de conflit, beaucoup penseront aux guerres ou au terrorisme. Mais si Berlin 2014 nous a offert trois visions différentes de conflits armés d'un passé plus ou moins lointain, ce sont aussi les récits d'actions syndicalistes ou de résistances citoyennes, qui ont fait les beaux jours du festival.Le film le plus marquant de la compétition fut certainement le premier long métrage de Yann Demange, "71", véritable immersion au cœur du conflit en Irlande du nord. Avec une caméra à la nervosité ingénieuse, celui-ci nous invite à suivre les péripéties d'un jeune soldat, coincé derrière les lignes ennemies, et ballotté de mains en mains entre alliés supposés, traîtres ou simples citoyens tentant de ne pas prendre parti. Jouant de subites accélération, le metteur en scène secoue le spectateur et décrit en filigrane toute la complexité d'un conflit devenu mode de vie.

Se penchant sur un épisode méconnu de la Seconde Guerre mondiale, George Clooney tente, avec "Monuments men" l'exercice périlleux de la comédie militaire. En suivant une équipe d'experts en arts chargés de retrouver les trésors volés par Hitler et d'empêcher leur destruction, il affirme haut et fort la nécessité de protéger la culture des peuple, comme élément de son identité. Ponctué de quelques moments d'émotion, le récit ne sait au final pas trop sur quel pied danser, entre comédie tarantinesque (la présentation des membres de l'équipe et de leur inaptitude aux exercices physiques) et quête sur fond d'avancée des troupes.

Plus contemporain, le film allemand "In between worlds" sur un officier envoyé en Afghanistan pour sécuriser un village, en attendant la relève par l'armée locale, et engageant un traducteur. Rôle de traître ou de collaborateur, c'est finalement le cas de conscience de ce dernier qui semble le point central du film. Cependant le caractère très manichéen de l'ensemble, le film stigmatise l’incapacité de l’armée à aider la population face à un ennemi invisible, la faiblesse des résolutions internationales et la rigidité des règles militaires. Une œuvre sans grand relief, pas même dans ses quelques scènes d'actions.

Dans " We come as friends", d'Hubert Sauper ("Le cauchemar de Darwin"), c'est l’après-conflit soudanais, qui mena à la division du pays en deux, qui est sujet de polémique. Décortiquant le rôle des ingérences américaines et chinoises, le réalisateur montre comment d'autres pays s'emparent des richesses locales, au détriment des populations sur place, maintenues dans la pauvreté. Au final ce sont avant tout les hypocrisies d’investisseurs ayant leur propre application du concept du « win-win » (gagnant-gagnant), que le réalisateur met en évidence, montrant ici une forme de résurgence moderne du colonialisme.

Découvert dans la section Berlinale Special, le biopic "César Chavez", signé Diego Luna, retrace lui le parcours d'un immigré mexicain à l'origine des premiers syndicats d'ouvriers agricoles. Plutòt classique dans sa construction, le scénario met en évidence les pressions, les coups tordus des propriétaires, les manipulations politiques, pour mieux faire ressortir la ténacité de son héros. Organisant une grève qui ne peut en avoir le nom (un décret avait interdit l'usage du mot « huelga ») le personnage est interprété avec vigueur et conviction par un Michael Peña impeccable.

Olivier Bachelard Envoyer un message au rédacteur