INTERVIEW

SA MAJESTE MINOR

Nous sommes au balcon d’un des étages de l’hôtel Hilton, installés dans des fauteuils autour d’une table basse. D’un côté, Jean-Jacques Annaud (Le nom de la rose, L’ours, La Guerre du Feu, L’Amant…), Mélanie Bernier (Vénus et Apollon, Barnie et ses petites contrariétés, Le temps de porte-…

© Studio Canal

Nous sommes au balcon d'un des étages de l'hôtel Hilton, installés dans des fauteuils autour d'une table basse. D'un côté, Jean-Jacques Annaud (Le nom de la rose, L'ours, La Guerre du Feu, L'Amant...), Mélanie Bernier (Vénus et Apollon, Barnie et ses petites contrariétés, Le temps de porte-plumes...) et José Garcia (La vérité si je mens, Pars vite et reviens tard...), et face à eux, seulement une dizaine de journalistes. L'ambiance est chaleureuse. Les questions peuvent commencer...

Journaliste :
Pourquoi avoir voulu réaliser un film tel que Sa Majesté Minor, très différent de tous les styles que vous avez abordés jusqu'ici?

Jean-Jacques ANNAUD : La joie de ne pas ressembler à tout ce que je venais de faire. Le bonheur de se sentir complètement libre à une époque où l'on souffre d'une uniformité, où l'on est prisonnier des conventions. Je voulais retrouver cette liberté salutaire. Pouvoir traiter de sujets tabous en toute liberté, en tout paganisme je dirai. J'ai voulu faire un spectacle de divertissement, une pure fantaisie. Cette époque d'avant Homère est un univers très peu exploré, et on y vit dans un quotidien de merveilleux proche de celui que l'on trouve en Afrique. J'ai eu une très forte envie de faire un pied à terre. Depuis dix ans, je voulais revenir à la comédie: entendre une salle rire est un vrai bonheur, un bonheur immédiat, que nous avons là, avec ce film.

Journaliste :
Qu'est-ce qui vous a donné envie de faire ce métier?

Jean-Jacques ANNAUD : Faire ce métier?...Pouvoir m'éclater sur un plateau! On fait pas ce métier pour faire des films d'industrie, mais dans l'espérance de sortir d'une certaine grisaille, qui était celle de ma vie quand j'étais enfant dans une banlieue de Paris. J'ai eu cette envie très jeune, à 7 ans. À 11 ans, j'ai eu ma première caméra. À 18 ans je suis rentré dans une école de cinéma, à 20 ans j'entame la seconde, j'ai mes diplômes de la FEMIS et de Louis Lumière, et puis j'ai toujours ce même appétit de rêve, de pouvoir vivre dans un autre monde. J'ai réalisé beaucoup de films publicitaires, et ensuite j'ai fait dix longs métrages, dont celui-ci est le dernier.

Journaliste :
Une question à José Garcia: On vous a vu dans Pars vite et reviens tard et là, on a eu un peu de mal à vous reconnaître....alors qu'est-ce que ça fait de faire le cochon ?

José GARCIA : Et bien ma foi, c'est plutôt sympathique... Pour une fois que je le fais à l'écran et pas chez moi ! Je suis très content de pouvoir changer un peu de genre et c'est assez agréable de se fondre dans un personnage un peu enfantin. Il n'y a rien de plus agréable que de s'effacer, pour créer la distance entre le personnage et l'acteur. Minor est un personnage enfantin et complexe: il faut passer de l'animosité, de la sauvagerie jusqu'à un stade beaucoup plus élevé. Il y a une progression énorme. Et, comme un imbécile, je n'avais pas bien lu les didascalies, et je me suis rendu compte de tout ce qu'il y avait à faire à côté trop tard ! En fait je lis trop vite, grosse erreur... Mais Jean-Jacques Annaud était là pour bien m'expliquer qu'il fallait faire des choses insensées toutes les deux secondes, et je crois que c'est l'une des plus belles expériences professionnelles que j'ai eu dans ma vie. J'ai pu retrouvé les années de liberté. Tous les jours le même défi : arriver en vie à la fin de la journée, après avoir été trainé par une truie de 300 kg sur 700 m ou après être tombé d'un arbre. J'étais pieds nus, alors que les autres sont en grosses chaussures et tenues de montagne à côté. On est dans la caillasse et les ronces. Lorsque quelqu'un se fait broyer le pied par la truie et qu'il est transporté à l'hôpital alors qu'il était en grosses chaussures, et que vous, vous regardez vos pieds nus euh... . Jean-Jacques Annaud est un malade mental ! Dès qu'il pouvait montrer quelque chose (cascade), il le faisait ! Il s'amusait avec les animaux, et maintenant, c'est bibi qui s'y colle! Parce que ce n'est pas à Brad Pitt qu'il l'a fait... c'est à moi!!! C'était une aventure sans référence. Une voie nouvelle et particulière. Jouer avec une truie et considérer que c'est sa femme pendant plus de sept ans, ce n'est pas dans une école de théâtre que vous verrez ça, parce que même si vous proposez l'improvisation, les gens vont vous dire « vous pouvez pas le faire avec une personne normale? ». C'était délicat : se faire sodomiser par un bouc, ce n'est pas tous les jours que ça vous arrive... Et puis le texte est particulier. Il faut aussi veiller à garder de l'animosité dans le regard, parce que si pendant cinq secondes vous avez une lueur dans le regard... je me souviens surtout, quand je regardais Mélanie : le fait de la regarder avec beaucoup de tendresse... si une idée vous passe dans le regard, vous devenez un homme. Et Dieu sait si c'est difficile de regarder Mélanie sans qu'une idée vous passe par la tête.

Minor est un personnage qui se rend compte de la perversion du monde. Quand on est acteur, on est un tout petit bonhomme, et puis d'un coup, on devient quelqu'un au regard des autres, et, dès que vous passez une frontière, vous vous rendez compte que vous n'êtes rien : on ne vous regarde même plus. On gère pas mal de chose lorsqu'on est acteur, sans le vouloir vraiment. On n'est rien qu'un tout petit cochon qui profite de la situation. Quand je bois un coup je ne reste pas José Garcia... je redeviens un petit cochon !

Journaliste :
Où avez-vous tourné ?

Jean-Jacques ANNAUD : À Alicante, sur la côte espagnole. On a fait des recherches sur tout le pourtour méditerranéen. On avait d'abord pensé au Maroc. Je voulais faire un film de soleil, un film de joie qui sente la garrigue, le thym, le romarin. Tous les décors sont à Alicante, entre extérieur et studio, car il y a des nouveaux studio là bas. Pour un film méditerranéen, il me fallait une figuration aux comportements méditerranéens. La gestuelle est fondamentale dans un film, pour la culture. La gestuelle anglo-saxonne me gêne. La gestuelle est innée, et donc il me fallait des figurants méditerranéens. Je voulais être en dehors du monde anglo-saxon. Utiliser le français comme langue de tournage me manquait: je ne l'avais pas utilisé depuis 25 ans au moins. C'était ici une langue pleine de liberté, de joie, d'inspiration.

Journaliste :
Comment avez-vous choisi les acteurs ?

Minor:
José GARCIA : Quand j'ai vu Jean-Jacques Annaud, je lui ai demandé: « Mais pourquoi quand tu as pensé à ce type qui vivait avec des cochons tu m'as appelé? » et il m'a dit « j'ai pensé tout de suite à toi ». Je n'ai pas cherché à en savoir plus.

Jean-Jacques ANNAUD : Le premier grand compliment que j'ai reçu sur ce tournage, c'est quand les producteurs de studio-canal ont vu les photos des quatre premières semaines de tournage et ont dit « c'est formidable, c'est fabuleux, mais est-ce qu'on pourrait avoir des photos avec José Garcia ? », « Ben il est là-dessous, sous le cochon! ». Il était méconnaissable. Il faut se poser la question de qui va pouvoir jouer autant de scènes différentes. Or, José Garcia est un homme caméléon. Il correspondait à ce rôle.

Pan:
Jean-Jacques ANNAUD : Pan est le dieu ancêtre du Diable de la religion chrétienne. Sensualité et beauté incarnent le Diable: Vincent Cassel y correspondait. Il y a une statue du Diable, à Reims, qui a le profil de Vincent Cassel. Chez un acteur, il y a le physique mais il y a aussi ce qui va avec. Il a travaillé sur des sabots tout au long du tournage, et a réussi à trouver une attitude, une démarche, qui lui a donnée un corps de bouc. Il arrive à sentir son corps. C'est aussi un vrai déjanté qui a une folie dans le regard.

Clytia:
Jean-Jacques ANNAUD : J'ai vu pleins de belles jeunes femmes, mais aucune ne correspondait. Je la voulais grande et très brune. Finalement j'ai vu Mélanie, l'entretien s'est très très bien passé, et ça a été elle sans aucune hésitation. J'ai eu très peur car je ne trouvais pas d'actrice comme je voulais.

Pour les autres acteurs, (Rufus, Claude BRASSEUR....)... j'adore ces comédiens! Ils m'ont toujours fait rire et ça me plait d'utiliser des comédiens qui ont un passé de cabaret, de café théâtre: j'adore leur générosité!

Journaliste :
Quel genre de recherches avez-vous faites pour ce film?

Jean-Jacques ANNAUD : Alors ça vous savez, je suis un fou de musées, j'ai passé mon année à aller des musées étrusques aux musées ibériques, je suis retourné dans tous les musées d'art greco-romain, j'ai visité la Sicile, la Toscane, en pays étrusque, dans le Sud de la France pour voir les Bories. Je me suis imbibé de tout ça et on s'est beaucoup appuyé sur l'art crétois, là on est dans ce qu'on appelle le Protobronze, c'est-à-dire la toute première époque des métaux. Selon les villes où vous voulez situer votre film, selon la proximité de la Mésopotamie ou de l'Egypte, de la Crète ou de Rhodes, forcément les dates ne sont pas les mêmes, la fourchette, c'est – 6 000 à – 1 600, disons – 4 000 -2 000 selon les îles. Là je me suis entouré, comme d'habitude, j'ai un peu mes réflexes là-dessus, d'une conseillère sur cette période, responsable à l'université de la Sorbonne de la civilisation néolithique des îles de Méditerranée, qui m'a fait rencontré la plupart des grands spécialistes. Que ce soit dans les domaines du textile où nous avons fait faire touts nos costumes en achetant une récolte de lin à des nonnes en Roumanie, où nous avons fait filer, teindre, avec des produits naturels, tels qu'ils étaient teints à la période antique, tout cela a été fait à la frontière de la Moldavie, parce qu'il n'y a plus que ces gens qui savent faire cela à l'ancienne. La Roumanie a gardé des traditions totalement ancestrales et tous les costumes ont été faits avec ces bandelettes de 30 cm, teintes et cousues à l'ancienne, avec des pièces d'étoffes ; selon les cas, l'étoffe était plus ou moins riche, plus ou moins travaillée, mais toujours exacte au plan historique et alors après avec ce bout d'étoffe, vous faites comme les Indiens, finalement, vous en faites un châle, une tunique, une toge, une barboteuse… Les indications me sont venues surtout de la poterie de cette époque, car, comme vous le savez sans doute, les meilleurs documents pour comprendre la vie quotidienne sont les décorations de ce qu'on appelle les cratères à vin, les amphores, toutes ces poteries. En particulier parce qu'on parlait des phallus postiches et des étuis péniens, peu de gens savent que, dans cette période de l'Antiquité, l'étui pénien était très répandu au point que, chez Aristophane, tous les paysans sont représentés avec un énorme phallus postiche, c'est la caractéristique du personnage comique qui vient de la campagne. A l'époque d'Aristophane, on porte encore ces phallus postiches, présentés dans les fêtes par les phallophores, tandis que des poètes dits itiphaliques c'est-à-dire qui font des poèmes à la gloire du pénis érigé, faisaient des poèmes spécialisés à la gloire de la reproduction, du plaisir du corps. On est dans une civilisation qui est très différente de la notre et qui considérait l'amour comme une nécessité, n'oubliez pas que le rapport entre le maître et l'élève était un rapport complet, qui est d'ailleurs admis et encouragé. Je vous rappelle qu'à l'époque les villes de Sodome, de Lesbos étaient des villes où il faisait bon vivre et personne ne trouvait rien à redire. C'est une autre lecture de l'histoire, plus tard, par les populations guidées par Abraham et le Dieu d'Abraham, qui ont fustigé ces nations. C'est une autre façon de penser, de voir la vie et on a essayé, nous, de se laver le cerveau et d'essayer de retrouver la simplicité, la bonne franquette de cette époque-là.

Il en va de même pour les Bories. Vous savez les maisons sont des cabanes de pierres sèches qu'on retrouve dans tout le pourtour méditerranéen et là on s'est inspiré des Bories provençales et de celles qu'on trouve à Malte et à Chypre.

Journaliste :
Quelle scène a été la plus intéressante à tourner ?

Jean-Jacques ANNAUD : La scène ? Qu'est-ce que tu dirais toi José ?

José GARCIA : Euh… écoutez moi j'ai toujours le souvenir du premier jour, qui m'a beaucoup impressionné. C'est celle où, vous savez, je sors avec les cochons. Jean-Jacques m'a dit « on va rentrer tous les cochons dans la porcherie, avec l'équipe technique, et puis toi t'iras au dernier moment comme y aura 2 autres caméras tu te frayeras un chemin et tu iras manger dans l'auge et tout ça. » Je lui dis « pas de problème » et puis ils arrivent avec les cochons. Il y en a 50, de toutes les tailles, 2 truies énormes, des énormes cochons d'élevages. Et ils rentrent les cochons à l'intérieur de la porcherie et là je crois que le tiercé de France à côté c'est rigolo! Je veux dire là, vraiment, j'ai vu arriver un truc monstrueux, ils ont tout rentré la dedans, ça bougeait, partout, y avait des cris, des trucs. Bon, tout le monde se range et là, ils ont fait rentrer l'équipe, et une fois que l'équipe est rentrée j'entends « Vas-y, viens, dépêche-toi ! » et l'image que je vois encore et qui me restera toute ma vie c'est une équipe technique et 50 cochons, le tout entassé dans 3 m², et tout le monde en train de dire « Ouais c'est bon, c'est bon, on y va, on y va ! » et tout d'un coup les cochons sont sortis. Je peux vous dire que, à la fin de cette scène-là, tout le monde s'est regardé et on s'est dit « putain, premier jour, ça commence très fort ! » et puis c'est allé crescendo.

Jean-Jacques ANNAUD : Je ne sais pas si vous vous rendez compte mais il y a plusieurs scènes tournées tête à l'envers. Pour un comédien, c'est complètement ahurissant! Moi, quand je l'écris, ça ne me pose pas de problèmes. « Il est pendu par les pieds au dessus de la falaise », ouais, d'accord, mais on fait quoi après ?

Où qu'on soit, il faut suspendre le comédien par les pieds! Et ça déjà c'est pas facile. Mais quand en plus il a un texte de trois pages à réciter... Il faut une grue, on est au bord d'une falaise, y'a du vent, on le met au dessus de la mer... et puis il faut être raccord. Et il faut être naturel, tout en ayant le sang qui vous monte à la tête...

José GARCIA : Une fois, ils m'ont suspendu au dessus du vide, avec mes jupes au dessus de la tête, et là j'entends « ok les gars on peut faire une pause » alors je lève ma jupe et je dis « euh t'es sûr là qu'on fait une pause? »... et ils étaient déjà en train de manger, alors que j'avais la tête à l'envers.

Jean-Jacques ANNAUD : on est dans un monde complètement fou. J'ai dit des choses affolantes sans m'en rendre compte. Je leur ai accroché des poids aux pieds pour qu'ils aient plus l'air d'en chier en marchant dans les marais. On est dans le rêve. Mais c'est aussi pour cela qu'on fait ces métiers là, c'est qu'on est dans un genre de folie douce.

José GARCIA : Le mieux qu'ils m'ont fait, c'était une nuit, je suis poursuivi et je dois sauter le long d'une paroi en glissant sur les fesses. Ils sont partis dans une espèce d'euphorie et ils ont tout mouillé pour que ça glisse et ils me préparent une sorte de descente avec des rochers, des cailloux...mais avec deux trois touffes d'herbes pour amortir un peu. Et il me dit « voilà t'arrives, tu sautes là-dessus et tu y vas ». C'était sur petite luge-pelle. Le cascadeur saute et je vois que, même dans son métier de cascadeur, il pourra mettre ça sur son CV ! Et il arrive et il me dit « ça y est tu vois tu peux y aller ». Je me dis ok si lui l'a fait. Je prend ma pelle, je saute , je fais 4-5m, et là je me relève...je me mets sur le côté, je regarde mes fesses... il y avait du sang partout je m'étais coupé le cul ! Je me retourne je regarde le cascadeur et je lui dis « mais t'es malade ou quoi y'avait des cailloux et tout ça » mais le cascadeur il avait un jean ! Et, en fait j'ai regardé le jean du cascadeur... il était défoncé de partout! Mais sauf que moi j'étais cul nu! Tout était comme ça.

Mélanie BERNIER : euh... alors avant je pense que c'est le jour où j'ai su que je faisais le film, le jour où Jean-Jacques m'a contacté pour me dire « c'est toi », ça c'est quand même le moment le plus fort de toutes les aventures que j'ai pu vivre sur ce film. Et après euh... en fait il y a eu beaucoup beaucoup de scènes où il y avait des moments forts. Moi j'aimais beaucoup les scènes de groupe, parce qu'on voyait tout ce village qui vivait, qui s'animait...et la figuration était très investie. Il y a eu des scènes qui ne sont pas forcément des scènes de plaisir, mais qui sont tellement angoissantes, qu'on les vit, du coup, vraiment. Les scènes avec José, où on en a quand même des pas faciles, où on se demande comment ça va se passer, où on en parle pendant des heures... au moment où on fait ces scènes là, elles deviennent très très fortes et elles nous apprennent aussi beaucoup de choses sur nous même, sur notre pudeur....

Jean-Jacques ANNAUD : Une anecdote : José souriait quand je lui disais : « Ce film est tout public » et il ne me croyait pas !

José GARCIA : Quand j’ai vu le film, j’étais étonné, c’était châtié et tout ça. Mais nous, ce qu’on avait à faire, c’était pas du tout châtié. J’ai eu un coup de chaud à un moment, ou je m’endors sur la route, quand j’avais lu les didascalies j’avais pas fait attention mais je m’endors les fesses à l’air sur une route où il n’y a rien, où on est dans une solitude totale et je vois arriver toute la figuration ; que des filles. Et moi j’étais par terre endormi et je me disais : « Nom de Dieu, ça doit être horrible ! ». Je suis reparti tout penaud, humilié, moi qui suis super pudique, je me suis dit « Putain t’es tombé super bas, José, super bas ! » Et après j’ai pris sur moi deux trois cauchemars et puis c’est reparti !

Jean-Jacques ANNAUD : Ce qui me fait plaisir, c’est qu’il y a une semaine, la motion de censure à vu le film et qu’à l’unanimité, elle a décrété ce film tout public, sans aucune restriction.

José GARCIA : En même temps, avec Mélanie, on a une scène où, vous savez, toutes les fleurs éclatent, qui au résultat est super jolie, complètement fraîche… Mais nous on était quand même dans un arbre à au moins trois ou quatre mètres, sur une branche spéciale. On a dû monter à poil, avec notre pudeur, et, même si on s’aime beaucoup, c’est quand même un moment délicat. Et après ils ont lâché les loups. Donc on avait les loups en bas, une équipe technique sur les côtés, et si on loupait une branche, non seulement vous vous abimiez des trucs qui servent mais quand vous arrivez en bas, les loups vous bouffent. Et le tout dans la sensualité la plus totale, avec les loups qui essayent de grimper. Je veux dire moi, les fantasmes, c’est fini. Je veux être pénard, chez moi, une camomille et puis au lit ! Dans les trucs sordides j’ai tout fait ! Maintenant, je rencontre n’importe quel mec dans une soirée qui me dit « T’as déjà fait ça, toi ? ». Je lui dis : « Et alors, dans un arbre avec des loups, tu l’as déjà fait avec des mecs qui te filment ? » « Non » « Ah ! Mon pauvre garçon, t’y connais vraiment rien à la vie ! »

Journaliste :
Votre personnage de femme joue beaucoup sur son corps pour se faire entendre, comment l’avez-vous vécu ?

Mélanie BERNIER : Beaucoup par rapport au pouvoir puisque c’est quand même un film sur le pouvoir. Clytia a du pouvoir rien que par sa beauté, elle est très belle donc elle a accès à beaucoup plus de choses que les autres. Aussi, elle est fille de patriarche et ensuite, quand elle va faire sa plaidoirie, ce sur quoi elle va jouer, c’est surtout son apparence physique. Elle a très bien compris que, devant cette assemblée de vieillards, ce n’est pas ce qu’elle dira qu’on retiendra, mais plutôt ce qu’elle montrera. Son corps est son outil majeur pour arriver à tout ce qu’elle veut. C’est aussi comme ça qu’elle séduira notre ami Minor… Les femmes sur le plateau, de toute manière, étaient très libérées. On était très maquillées toutes ensemble, et Dieu sait si Jean-Jacques a eu du mal avec moi et ma pudeur. Et puis au fil du tournage, on s’est rendu compte qu’on se voyait tous pratiquement à poil tous les jours, que les figurantes étaient très à l’aise avec ça parce qu’on avait toutes des décolletés très profonds et il arrivait très souvent que la poitrine dépasse. Tous ensemble, on s’est aperçu que ce n’était pas si grave, ça n’avait plus d’importance.

Jean-Jacques ANNAUD : Clytia dit un moment : « Mon corps a plus de pouvoir sur vous que mes paroles ». Dans ce monde très machiste, les femmes politiques qui sont choisies le sont généralement pour leur physique, plus que pour leurs compétences. On l’a vu lors des élections nationales, où, au-delà des idées véhiculées, le physique jouait une part très importante. Il y a là un commentaire assez universel et le personnage de Clytia allait dans ce sens. Lorsqu’elle se dévoile, elle le fait par provocation, elle regrette que les villageois n’écoutent pas ce qu’elle dit.

Tom GINEYTS, terminale scientifique
Laureline MASSON, terminale Littéraire

Olivier Bachelard Envoyer un message au rédacteur

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