RUDO ET CURSI

Un film de Carlos Cuarón

La balle au cancre

Rudo et Cursi, deux frères ennemis idiots et attachants, travaillent dans une plantation de bananes au Mexique. Ils décident de tout plaquer sur un coup de tête pour vivre leur rêve : devenir célèbres et faire construire une maison pour leur mère. Aussi improbable qu’il y paraisse, c’est le football professionnel qui leur donnera l’opportunité de briller un instant…

D’un côté, il y a le colérique, l’acariâtre, le nerveux : c’est le « Rudo », le « dur », avec qui tout le monde en prend pour son grade. Beto, de son vrai nom, est un imbattable gardien de but au sein d’une équipe locale de bouseux et de ramasseurs de bananes. Il rêve de jouer dans une équipe professionnelle à Mexico. De l’autre côté, le doux, sensible et aimable garçon : c’est le « Cursi », le « fleur bleue », qui voit le grand monde depuis l’échelon de son inénarrable naïveté. Tato, comme il se nomme, possède un pied droit du tonnerre, capable de pourfendre toutes les défenses adverses ; mais il rêve de devenir une star de la musique, un parangon de la « variétoche », et s’entraîne d’arrache-pied sur son accordéon.

Beto et Tato sont frères. Ils travaillent dans la même plantation de bananes, où l’un est contremaître et l’autre simple porteur. Un peu idiots ou pas très malins, au choix, ils sont tous deux des génies du terrain, l’un pour talocher les ballons, l’autre pour les saisir. Ils rêvent tous deux de grimper à l’échelle de la gloire, de devenir des vedettes et gagner des pyramides de billets… pour pouvoir offrir cette maison au bord de la mer fantasmée par leur maman-poule. Y’a-t-il plus noble motivation ?

Le premier film de Carlos Cuaron, « frère de », fonctionne sur un gentillet antagonisme fraternel. Rudo et Cursi, Diego Luna et Gael Garcia Bernal, Carlos et Alfonso Cuaron. Ou comment les parcours professionnels de l’un et de l’autre se développent en parallèle et, comble de la réussite, tombent en une jointe disgrâce. Au hasard d’un passage dans la campagne mexicaine, les deux frères sont embrigadés par Batuta, agent de footballeurs auquel Guillermo Francella confie sa voix de baryton et ses yeux perçants – bouclant un trio qui constitue le meilleur de l’interprétation latino-américaine actuelle. Le film relate l’odyssée des deux frères au sein de leur club de football respectif, la carrière de chanteur raté de Cursi, les colères cycliques et l’obsession du jeu de Rudo, jusqu’au match final de la saison qui, bien sûr, les fait s’affronter enfin. Si les deux frères ne réussissent au final qu’à revenir à leur point de départ, ne doutons pas que les frangins Cuaron, eux, continueront de monter l’échelle de la gloire sans trébucher.

Eric NuevoEnvoyer un message au rédacteur

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