UNE SIRÈNE À PARIS

Un film de Mathias Malzieu

Deux jolis plongeurs pour un tout petit splash

Crooner au cœur brisé qui chante dans une péniche-cabaret (le « Flowerburger ») située sur les bords de la Seine, Gaspard rencontre un jour Lula, une sirène qui fait chavirer le cœur des hommes par le chant. Entre celui qui souffre d’avoir trop aimé et celle qui n’a jamais aimé, une histoire forte va alors naître…

Une sirène à Paris film image

Face à un film comme "Une sirène à Paris", on se retrouve forcé de ressortir ce vieil adage connu de tous : le charme, ça ne se décrète pas. On ne demanderait que ça, d’être émerveillé, y compris face à une histoire aussi ouvertement naïve et romantique que celle d’une love-story entre un humain et une sirène. D’autant que, cinéphilie oblige, le souvenir de l’amusant "Splash" de Ron Howard, dans lequel Daryl Hannah chamboulait le quotidien d’un Tom Hanks jeunot, est encore bien présent dans nos mémoires. On ne met hélas pas plus de dix minutes pour saisir à quel point Mathias Malzieu ne va pas reproduire le même effet.

Point de romance joliment cul-cul qui nous ferait fondre, mais une rencontre qui démarre sur un mode ubuesque – le jeune héros n’a pas l’air si surpris de tomber sur une sirène en plein Paris ! – pour évoluer ensuite de façon assez incompréhensible – serait-ce parce qu’elle aime les poissons panés que lui cuisine son hôte que la sirène s’entiche de lui ? Point d’émerveillement, mais une magie qui semble plaquée de façon artificielle sur des scènes qui se suivent sans se répondre, avec un montage hasardeux qui fait se succéder des transitions tantôt maladroites tantôt artificielles. Point de divertissement abouti, mais un programme résumé aux deux lignes de son synopsis (lire plus haut, on n’a pas pu en écrire davantage…) qui ne nous donne jamais un minimum de biscuit.

Mathias Melzieu a certes du talent, voire de l’imagination pour aller dans le sens de la « morale » de son film (il faut avoir de l’imagination, merci, on sait…). Le gros souci, c’est qu’il intègre ses idées – surtout une vision folklorique des spectacles parisiens – dans un contexte mi-réaliste mi-onirique qui frise le patchwork nonsensique. En vrac : un Paris ripoliné à grands coups de dépoussiérant Jean-Pierre Jeunet, de la stop-motion à la Michel Gondry pour ouvrir et fermer le film comme s’il s’agissait d’un livre en relief, un hôpital Saint-André aussi glauque qu’une morgue de slasher, sans parler d’une avalanche de mots zarbis qui ne veulent rien dire (comme « surprisier » ou « flowerburger ») à défaut d’essayer de dessiner une éventuelle mythologie. Petit bémol, également, du côté des chansons du groupe Dionysos, pas entraînantes ni émouvantes pour un sou, même si le très beau morceau All The Pretty Waves (celui qui accompagnait la fin de la bande-annonce) arrive à faire illusion le temps d’un intermède aquatique de… dix secondes !

Égares dans ce fourre-tout, les acteurs ne sont alors que des pantins désincarnés, répétant un texte plat et débitant des dialogues de maternelle avec une conviction forcée (surtout Rossy De Palma dans le rôle de la voisine un peu trop curieuse), quand ce n’est pas le ridicule qui s’empare carrément d’eux (pauvre Romane Bohringer qui se débat dans un rôle atrocement mal écrit). Plus problématique encore, la sirène du titre ne nous ensorcelle jamais : aussi mignonne soit-elle, Marilyn Lima n’a pas le quart du tiers de la moitié du charme de Daryl Hannah et joue comme une chanteuse de la Star Ac’ légèrement déphasée un soir de prime. Heureusement, il y a un rescapé à ce naufrage programmé : Nicolas Duvauchelle, enfin débarrassé de ses rôles de bad boy et de lascar borderline, qui tire ici vers le haut un rôle relativement ingrat. Charme évident, charisme d’un enfant coincé dans un corps d’adulte, naïveté constamment touchante, voix de crooner à la Serge Gainsbourg : l’acteur en impose et révèle une partie peu exploitée de son registre. Pour lui, le film mérite un (petit) coup d’œil.

Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur

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