INTERVIEW

BANCS PUBLICS

Journaliste:
Pourquoi ce film particulier a-t-il mis autant de temps à sortir en salles ?

Bruno Podalydès:
Le mixage a en effet été réalisé l’été dernier. Mais nous avons eu des problèmes avec la musique. Le compositeur a dû décrocher pour des raisons personnelles. Nous…

© UGC Distribution

Journaliste:
Pourquoi ce film particulier a-t-il mis autant de temps à sortir en salles ?

Bruno Podalydès:
Le mixage a en effet été réalisé l'été dernier. Mais nous avons eu des problèmes avec la musique. Le compositeur a dû décrocher pour des raisons personnelles. Nous n'avons pu être prêts pour le 22 octobre 2008, date initialement prévue. Mais nous avons été heureux de retrouver deux autres musiciens. Ici, on me parle souvent de film choral, terme que je n'aime pas, car les acteurs ne chantent pas en choeur. J'ai en fait continué à travailler et remonté le film, dans l'idée de le raccourcir.

Mais je voulais garder ce principe d'une multitude de scènes, car j'aimais aussi l'idée de créer une certaine fatigue vers la fin. Je pourrais écrire sans fin sur ce square ou sur les anecdotes dans le magasin de bricolage. C'était vertigineux. Il fait 1h50, mais on aurait pu en faire 4h. Au montage, on aurait pu presque tout couper, mais je voulais une amplitude, qui vienne autant du casting que des petits évènements quotidiens.

Journaliste:
Quel a été le point de départ en terme d'écriture ?

Bruno Podalydès:
Jadis, j'avais lors d'une émission radio, entendu un fait divers lié à la banderole. Puis il y avait le titre, dégagé de la chanson de Brassens, "bancs publics", qui résonnait comme un bien commun qui a tendance à disparaître, un lieu où quelqu'un peut se reposer. Puis il y a eu aussi une anecdote, dans un magasin, où les fils d'un bricoleur se faisaient engueuler: "du 12 pas du 13"...

J'ai développé les personnages comme dans "Le parfum de la dame en noir", ce qui avait dérouté, de manière anecdotique. J'avais des idées de métaphore autour de l'eau, qui s'étale en pluie sur le square, et du back-gamon, jeu stratégique où chacun des pions a la même valeur, un peu comme les acteurs dans le film.

Journaliste:
Vous aviez des comédiens en tête dès le départ pour ces rôles ?

Bruno Podalydès:
J'essaie beaucoup d'écrire sans penser à des comédiens, d'autant que souvent, à la veille du tournage, j'ai envie de "nouveau", et que j'écris sur des gens ordinaires. Le casting est arrivé dans l'allégresse, durant le mois et demi précédent le tournage. On se partageait les acteurs avec le film de Ribes ("Musée haut, musée bas") et il avait peur comme moi, du film à sketches, peur des cloisons étanches. Tout cela relève finalement d'un travail d'horloger...

Journaliste:
Du coup, est-ce que le plan de travail a créé de l'inattendu ?

Bruno Podalydès:
Je voulais par exemple que Girardot, comme d'autres, apparaisse différent, sorti de son contexte. Ce qui m'intéressait, c'est qu'on peut ne pas communiquer du tout, mais parfois l'indifférence des gens vis-à-vis des autres s'arrête, à certains moments, comme dans le métro (avec le chanteur) ou dans le square (avec le clodo qui demande l'heure).

Journaliste:
Votre film boucle une trilogie, il est d'ailleurs sous-titré ("Versailles chantiers"), mais il semble pourtant opposé, versant dans la nostalgie...

Bruno Podalydès:
Dans "Dieu seul me voit", on était dans le cerveau de quelqu'un, témoin de ses contradictions. Ici on est dans des cerveaux différents, dans les dialogues entre eux, en des lieux de trafic. Du coup, il y a des solitudes qui se côtoient, chacun s'arrangeant de celles des autres...

Journaliste:
Comment est l'acteur Bruno Podalydès ?

Samir Guesmi:
C'était drôle, parce qu'on le croisait qui courrait dans les couloirs, et revenait 5 minutes plus tard avec sa blouse bleue... à nuages. Peut-être qu'on était mouillé ensemble, mais il y a eu aussi un rapprochement entre acteurs... On peut encourager tous les réalisateurs à le faire au moins une fois... jouer.

Bruno Podalydès:
J'encourage aussi les acteurs à réaliser, car il est souvent facile de ne pas vouloir connaître les problèmes de préparation, de technique ou de réalisation...

Samir Guesmi:
Il fallait soulager le réalisateur le plus possible, comme par exemple avec l'histoire de la montre...

Bruno Podalydès:
J'ai retrouvé cela aussi avec Olivier Gourmet, qui trouve toujours des trucs qui enrichissent les scènes, avec discrétion (voir le coup des gobelets en arrière plan...). Chacun avait la liberté de le faire, à condition de ne pas perturber le jeu des autres...

Samir Guesmi:
Bruno a donné beaucoup de place ici aux seconds rôles. On peut même dire qu'il n'y avait que des premiers rôles, ou que des seconds. Du coup, on est vite décontracté, parce qu'il n'y a pas de première ligne...

Bruno Podalydès:
Personne n'a le sentiment de porter le film... même pas moi ! (rires)

Journaliste:
Petite indiscrétion pour finir, quel est le secret que dit le garçon ?

Bruno Podalydès:
Il y en a un. Mais j'ai demandé à Nino de ne pas le dévoiler. Et en fait, il est possible qu'il y ait eu du changement d'une prise à l'autre... Il y a donc peut-être plusieurs secrets.

Olivier Bachelard Envoyer un message au rédacteur

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