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UNE AUTRE VIE QUE LA MIENNE

Laborieux

De son adolescence à la fin de années 70, à la fin des années 90, il aura fallu presque 30 à Andrej, s’étant finalement marié et ayant eu un fils, pour affirmer qu’il n’est pas né dans le bon corps. Mais en Pologne, il ne peut changer de genre qu’en obtenant un jugement qui lui l’autorise et doit d’abord avoir divorcé…

Il est d’autant plus regrettable de constater à quel point "Une autre vie que la mienne" rate le coche niveau narratif comme émotionnel, alors qu’il s’agit d’un film aussi engagé politiquement. Exprimant pourtant clairement les difficultés des personnes trans polonaises à obtenir gain de cause pour un changement de genre, le nouveau long métrage de Malgorzata Szumowska ("Aime et fais ce que tu veux", "Body", "Mug") déjà associée à la réalisation avec Michal Englert (son scénariste) sur "Le Masseur" ("Never Gonna Snow Again") avance laborieusement vers le film de procès, au fil de longs allers-retours avec l’enfance, l’adolescence ou la jeunesse du personnage. Éclairant ainsi maladroitement ses interrogations identitaires, par ce qui semble des anecdotes (vernis aux ongles lors d'un examen pour l'armée, déguisement en infirmière pour fêter la révolution de 1989, habillement en sous-vêtements de femme surpris par son fils…) le long métrage met un certain temps à parvenir au cœur du sujet : la question des droits des personnes trans en Pologne.

Côté mise en scène, les tics et les effets faciles sont nombreux, des montages rapides ou plans tronqués lors de premiers émois ou ébats hétérosexuels, aux ralentis lors d’une séquence de sport entre mecs (le rugby…), en passant par diverses scènes symboliquement appuyées (dont celles qui ouvrent et bouclent le film. Heureusement subsiste un traitement d’une complicité amoureuse avec la femme (formidable Joanna Kulig, vue dans "Ida"), qui persiste malgré les épreuves et le sort réservé à son mari. Mais le mal est fait et ce qui aurait pu être un film étendard n’est finalement qu’un mélo laborieux, d’où s’échappent ponctuellement quelques considérations sur l’emprise des hommes et des médecins (« la testostérone c’est le pouvoir ») ainsi que la nécessité d’être enfin soi-même.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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