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LES INDESTRUCTIBLES 2

Un film de Brad Bird

Super tout court

La famille formée par Bob Parr, sa femme Hélène et leurs enfants Violette, Flèche et Jack-Jack doit faire face à un nouvel ennemi qui hypnotise ses victimes dans le but de faire chuter l’image des super-héros aux yeux du reste du monde. De nouveau le monde à sauver… et aussi beaucoup de problèmes du quotidien à résoudre par la même occasion !

Il y avait tout à espérer, mais aussi tout à craindre d’un second épisode des "Indestructibles". D’abord parce que le premier épisode, en plus de renvoyer d’un coup sec vingt années de déjections super-héroïques au fond de la cuvette des WC, avait réussi à intégrer la tonalité douce-amère propre aux productions Pixar dans un contexte de blockbuster ultra-spectaculaire qui semblait surfer à contre-courant. Ensuite parce que son alliage virtuose de fulgurances spectaculaires et d’ironie existentielle en avait fait le seul film de super-héros digne de ce nom – hormis l’excellente trilogie masquée de Christopher Nolan – à avoir développé une réflexion complexe et sensée sur l’ancrage des figures mythiques de la pop-culture dans une réalité contemporaine qui tend à vouloir les uniformiser au sein d’une culture de masse, ainsi que sur l’identification et l’aliénation que ces figures pouvaient susciter. Enfin parce que sa mise en scène virevoltante, signée par un Brad Bird qui avait alors poussé tous les curseurs à mille, faisait preuve d’une maturité et d’une connaissance magistrale du découpage que Pixar ne possédait alors qu’épisodiquement.

Ajouter un numéro 2 à ce rêve de cinéma, qui plus est à une époque où les héros en lycra inondent la psyché du consommateur jusqu’au rejet pur et simple, c’était prendre un énorme risque. Un risque dont Brad Bird était visiblement conscient, se faisant ici un point d’honneur à le contourner par une fausse impression de redite. Parce que celle-ci n’est qu’apparente : si la narration joue souvent la symétrie avec celle du premier film et si l’effet de surprise est bel et bien annihilé par la nécessité de ne plus avoir à introduire les personnages (leurs pouvoirs sont désormais connus de tous), "Les Indestructibles 2" se veut surtout une prolongation narrative au sens premier du terme. C’est toutefois sur son scénario que la déception se fait un poil ressentir a posteriori : oser prolonger la destinée de cette famille de super-héros en les faisant combattre ce qui représente désormais un cliché du genre (en gros, un ennemi omniscient qui veut manipuler les super-héros pour les rendre moins « super » aux yeux du monde), et ce au détriment de la réflexion parfaitement équilibrée qui faisait le sel du premier film, passe pour une régression. Légère, certes, mais tout de même bien tangible, d’où la moue tranquille que l’on peut souvent afficher devant des scènes déjà vues et des enjeux déjà explorés.

Encore heureux que, pour contrecarrer ce léger sentiment déceptif, Brad Bird soit là pour cracher la purée en matière de spectacle étourdissant et surdécoupé avec génie. Fidèle à son image de « Monsieur Plus », le cinéaste impose là encore une surcharge de spectaculaire qui file le vertige, multiplie les perspectives inouïes pour spatialiser l’action le mieux possible (on en mesure tout le brio lors d’une ahurissante poursuite en moto avec Elastigirl) et impose chaque scène d’action comme un climax à part entière jusqu’à un final aquatique qui renvoie fissa celui de l’inénarrable "Speed 2" au rang d’un banal accrochage de canots entre septuagénaires. Sans oublier le clou du spectacle : le bébé Jack-Jack et ses dix-sept pouvoirs (!) qui volent la vedette à tout le reste de la famille et qui mettent les zygomatiques à très rude épreuve dans un nombre de scènes qui se comptent bien plus que sur les doigts d’une main. De quoi prouver une fois de plus qu’avec Brad Bird, deux fois plus, ce n’est jamais assez. En sortant de la salle, on en redemandait déjà. Vous aussi, vous verrez…

Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur

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