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IMAGINARY

Un film de Jeff Wadlow

En espérant qu’Hollywood vous entende crier

Alice et sa sœur Taylor s’installent dans la maison d’enfance de leur belle-mère Jessica et alors que cette famille recomposée essaye de trouver ses marques, un élément en apparence inoffensif va entraîner tout ce beau monde sur une voie dangereuse. En effet, la cadette Alice s’est trouvé un ami imaginaire du nom de Chauncey et après une série de jeux en apparence anodins, il semblerait que celui-ci soit plus qu’un ours en peluche tout mignon…

Blumhouse est une maison de production spécialisée dans le genre de l’épouvante et les petits films à grandes idées. Elle est dirigée depuis ses débuts par Jason Blum, qui aura remis au goût du jour une horreur minimaliste avec "Paranormal Activity" de Oren Peli en 2007. Et le bonhomme a toujours eu le pif pour dénicher des histoires effrayantes à nous présenter sur le grand écran pour un budget riquiqui. A titre d’exemple on parle de 1,5 millions pour le premier "Insidious" de James Wan ce qui n'est rien comparé à ce que certaines firmes dépensaient dans le genre au début des années 2000. Voilà la marque de fabrique de la maison de production emblématique qui a su nous donner de vraies frayeurs (on pense à "Insidious 1 et 2" mais aussi "Sinister", "Get Out", "The Bay"), mais aussi malheureusement donner naissance à une tonnes de produits interchangeables dont l'existence n’était parfois justifiée que par le profit engrangé. On peut citer ici les nombreuse et hideuses suites de la saga au départ prometteuse qu’aurait pu être "American Nightmare" ou encore les soporifiques "Ouija" (Stiles White, 2014) et consors, l’horrible remake de "Firestarter" et des choses inqualifiables tels que "Nightmare Island" de Jeff Wadlow.

Attendez, ce nom nous est étrangement familier. Réalisateur technicien au service des scripts de belles bêtises ("Never Back Down" restera culte aussi pour ça) tels que "Truth or Dare" ("Action ou Vérité") en 2018, qui est, à la base rappelons le, l’adaptation d’un jeu d’adolescents en pleines crises d’hormones lors de soirées pyjamas. Malheureusement pour nous, le bonhomme s’allie de nouveau avec le producteur légendaire. Et ils arrivent devant nous avec "Imaginary". On ne veut pas trop s’avancer ici à la rédaction, mais si vous avez vu les bandes annonces ou lu le résumé de la dite œuvre cinématographique, vous avez déjà flairé l’odeur de poisson pas frais. Rien n'est inventé dans "Imaginary", de la situation initiale de la famille recomposée aux divers mécanismes de l’horreur jusqu’à son déroulé narratif. Nous ne nous attendons certes pas à ce que chaque film ouvre de nouveaux horizons et redéfinisse le cadre du genre dans lequel il s'établit. Et nous n’allons pas avoir ce genre d'attente quand il s’agit de productions d’exploitations avant tout faites pour rapporter de l’argent (dû à leur faible coût de production notamment) plus qu’à changer à tout jamais notre vision du cinéma. Mais il s’agirait surtout de faire un film qui au moins essaye de ne pas trop montrer ses influences, au risque de ne pas tromper le spectateur quand il pille les 40 dernières années de ce qui s’est fait de mieux dans le genre.

Ici nous avons donc un remake inavoué du "Poltergeist" de Tobe Hooper et papy Spielberg avec le même procédé de l’ami imaginaire en lien avec des dimensions surnaturelles et autres démons à poils longs. Et c’est comme si la direction artistique avait été confiée au stagiaire, qui se serait souvenu la veille que le Lointain dans "Insidious" ça fonctionnait bien et s’était dit que la trilogie "Hellraiser" combinée à la saga "Freddy" ça rendrait bien pour l’esthétique autour des rêves. Nous sommes durs et croyez-le ou non, mais il n’y a rien de réjouissant à critiquer et à mettre plus bas que terre un pan de la production horrifique made in USA de ces derniers temps. Le constat est amer et les films d’épouvante venus d’Amérique de grandes distributions (on insiste là-dessus) ont cessé de se renouveler. Nous croisons les mêmes situations avec la belle-mère qui a du mal à tisser des liens et qui va peu à peu paraître folle aux yeux de ses proches, le passé refoulé qui cherche à tout prix à sortir, les rebondissements scénaristiques superficiels (« oh tiens en fait, tout ceci était dans ma tête »), le père qui s’en va en tournée et n’est jamais resollicité du film entier… Si tout ceci était emballé avec une énergie particulière, une mise en scène inspirée, des acteurs impliqués… Mais hélas tout le monde n’en a que faire et le tout est en pilotage automatique.

Le plat doit être servi au plus vite sans savoir s'il sera ne serait-ce que beau à regarder. La valeur esthétique ne s’applique pas dans le triste monde bleuté de Chauncey où il est difficile de distinguer quoi que ce soit. Aucun personnage n’entretient de vrais liens, les séquences semblent détachées les unes des autres, hormis quand la voisine d’à côté pointe le bout de son nez et remplit le rôle de scénariste jusqu’à disparaître grossièrement (pourtant portée par la trop rare Betty Buckley). Et vous saviez que le nouveau truc des jeunes aujourd’hui c’est de prendre de l’ecstasy à 16 h pour le goûter plutôt qu’un pétard ? Une méconnaissance totale du public auquel il est censé s’adresser, doublée d’un mouvement cynique presque pris comme un doigt d’honneur lorsqu’il s’agit de simplement nous faire aimer les personnages et nous faire peur. Nous avons les films qu’on mérite, visiblement.

Germain BrévotEnvoyer un message au rédacteur

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