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INTERVIEW

REVIVRE

Karim Dridi et Emma Soisson

réalisateur et productrice

Les mots nous manquaient en sortant de la découverte du nouveau film de Karim Dridi, et de ce fait, au vu d’un tel voyage émotionnel, l’intérêt de cette rencontre presse consista autant à creuser la conception même du documentaire qu’à évoquer le rapport intime de Dridi à son propre sujet. Rencontre avec un réalisateur toujours aussi humaniste et passionné par son travail, pour le coup accompagné et épaulé dans ses réponses par sa productrice Emma Soisson.

Entretien Interview Rencontre
© Pyramide Distribution

Fiction et documentaire

Karim, votre filmographie navigue entre fictions et documentaires, avec toujours ce même souci d’explorer un contexte social et/ou culturel précis. Qu’est-ce qui motive en général votre choix d’aller vers l’un ou vers l’autre, et qu’en fut-il pour le projet "Revivre" ?

Karim Dridi : C’est une bonne question, je ne me la suis jamais posée ! (rires) En fait, je suis très instinctif, je ne travaille pas trop cérébralement. Dans mon cas, je dirais que ce sont surtout des rencontres qui provoquent un film. Dans le cas de ce film, tout a démarré par ma rencontre avec ces clowns qui interviennent dans un hôpital : à l’origine, je devais faire un film sur eux, je les ai donc suivis dans leur travail, et cela a fini par devenir le film que vous avez vu, à savoir quelque chose de plus centré sur les familles, les couples et les parents.

Au départ, j’avais répondu favorablement à la proposition d’un médecin qui consistait à tourner un film dans l’hôpital, et du coup, le choix du documentaire s’était imposé de lui-même. Je ne m’imaginais pas faire une fiction avec des clowns à l’hôpital, même si j’ai récemment appris que Reda Kateb avait tourné dans une fiction qui parle précisément de ce sujet-là. Ce n’est pas pour rien que la fiction existe, mais pour ce film-là, elle ne s’imposait pas. Je n’aurais pas pu demander à des acteurs de jouer cela (même si certains sont capables de tout jouer) parce que simuler autant d’espoir, de douleur et de joie m’aurait semblé indécent, voire moralement dérangeant. Je pense donc qu’il n’y a que le documentaire pour traiter ce sujet.

Ces deux couples avaient-ils été identifiés dès le départ comme sujet de votre film ?

KD : En réalité, ça n’a pas commencé avec ces deux couples. Pour faire une analogie, je suis parti à la pêche sans savoir si j’allais ramener dans mon filet une sardine, un thon ou une baleine. Et au final, ce fut encore plus gros que ça. Mais au départ, j’ai simplement cherché mon sujet, je n’avais rien de prédéfini en tête. J’ai d’abord suivi les clowns, puis cela m’a amené en réanimation, et à partir de là, je me suis demandé ce qu’il serait intéressant de filmer. Concernant les soignants, je me suis dit qu’il y avait déjà tellement eu de films magnifiques sur cette profession ou sur les enfants malades, alors à quoi bon en faire « un de plus » ? En revanche, je ne me suis pas souvenu d’un film sur les parents d’enfants placés en réanimation. Et dès lors, tout s’est fait par identification. Lorsque j’ai commencé le projet en 2014, ma fille venait d’avoir quinze jours. Une fois à l’hôpital, je me suis très vite identifié aux parents, en me demandant qu’est-ce que je ferais à leur place. Ça a été le déclic.

Emma Soisson : [A Karim Dridi] Il faut dire aussi que, sur le documentaire et la fiction, tu es toujours dans la recherche de cette « frontière » entre les deux. On peut parfois penser que tes fictions se rattachent au documentaire : par exemple, sur "Chouf", tout le monde te disait qu’il semblait y avoir beaucoup d’improvisation alors que ce n’était pas du tout le cas. Et tu as surtout ce travail de terrain sur la fiction qui rejoint ton travail dans le documentaire… Je pense que c’est un désir inconscient qui surgit chez toi à un moment ou à un autre, et qui fait que, tout à coup, tu as envie de capter quelque chose…

KD : J’adore les imprévus… Surtout, j’estime que j’ai toujours besoin du réel, y compris dans le cadre d’une fiction. Je trouve que le réel est parfois bien plus fort que toutes les fictions, et aussi que toutes les fictions les plus dingues se nourrissent du réel. Par exemple, un cinéaste que j’admire et qui est pourtant aux antipodes de mon style, c’est Terry Gilliam : jamais je ne serais capable de faire ce genre de cinéma, mais je sens quand même que lui aussi s’inspire du réel, de son vécu, de ses rêves, de son imagination. C’est aussi le cas de Buñuel, que j’admire également. Bon, après, il est vrai que j’admire aussi Ken Loach, et même si on n’est pas pareils, je me sens plus proche de son style à lui, qui consiste à travailler avec le réel, et qui, par ailleurs, navigue lui aussi entre la fiction et le documentaire.

Est-ce qu’on « met en scène » le réel ?

KD : Non… (il réfléchit) On met en scène à partir du moment où l’on regarde. Si on regarde une chose, on est déjà en train de structurer ce regard, notamment en le juxtaposant à un autre regard. C’est pour ça que quand je filme, je tiens toujours la caméra moi-même, non pas en la posant sur mon épaule mais en la collant au niveau de mon ventre. Cela me permet de voir les gens avec mes yeux et d’avoir en même temps une caméra qui, sans être à la même hauteur que mes yeux, se trouve à la même distance de mon sujet. Du coup, la mise en scène est induite dans ma manière d’être, d’exister, de regarder et de bouger. En fiction, c’est aussi le cas mais c’est beaucoup plus délayé, aussi bien par la présence des acteurs et du chef opérateur que par les répétitions que l’on fait en amont.

Tournage et montage

Vous faites beaucoup de prises pendant le tournage et beaucoup de montage après, ou est-ce que vous avez l’instinct de ne capter que ce qui vous intéresse ?

KD : Sur ce film-là, j’ai tourné deux cents heures de rushes pour un montage final d’une heure trente-huit, et ce sur deux années de production ! Donc, oui, il y a eu beaucoup d’esquisses au fil du processus. C’est vraiment comme la pêche : on est patient, on cherche sans savoir ce que l’on cherche, et quand on finit par trouver ce que l’on cherchait, on ne le lâche plus.

On le devine assez bien lorsque l’on voit le nombre de familles qui sont remerciées au générique de fin…

KD : Tout cela a nourri mon regard. Il faut savoir que quand j’arrive sur Julien et Romane, puis sur Stéphanie et Ismaël, j’ai déjà filmé plusieurs familles avant eux, et cela m’a permis d’aiguiser mon regard. J’ai donc déjà une perception des choses, du lieu, des équipes soignantes, de l’espace exigu d’une chambre en réanimation avec toutes ces machines incroyables, donc de comment il faut se placer sans déranger la circulation de tous ces gens. Parfois, dans le cas où l’on ne peut pas amener l’enfant au bloc, il y a des opérations qui sont effectuées dans la chambre. C’est ce qui fait que j’ai pu assister à des cas de ce genre avec une quinzaine de personnes dans une toute petite chambre, et quand on se retrouve dans ce genre de situation, moi et mon ingénieur du son devions nous faire plus que discrets !

Quels sont les écueils que vous avez rencontrés sur ce film, que ce soit en réalisation ou en production ?

KD : On en a rencontré tellement… Pour la réalisation, c’est rien de le dire ! Moi j’ai commencé à faire des longs-métrages de cinéma une fois la trentaine entamée (j’avais trente-deux ans quand j’ai tourné "Pigalle"). Avant cela, à vingt-deux ans, je commençais à faire des courts-métrages professionnels. Et encore bien avant cela, c’est seulement à douze ans que je commençais à tourner mon premier film. Je pense qu’à trente ans, j’aurais été incapable de faire un film comme "Revivre". Techniquement, le film n’a rien de compliqué en soi, mais la force psychologique qu’amène une telle expérience nécessite quand même une vraie maturité.

Faire un film, c’est tout le temps risqué. Le gros risque, c’est bien sûr l’échec, le fait de louper son film, mais pour moi, sur ce film-là, ça aurait été de ne pas avoir la bonne distance. C’est-à-dire d’être soit trop proche, soit trop loin du sujet. Trouver cette bonne distance en étant respectueux de ces gens qui sont engagés dans une aventure incroyable, où se mélangent tant de joies et de souffrances, ce n’est pas simple. Il n’y a rien de plus terrible que ça, et en même temps, il n’y a rien de plus beau que ça. Trouver la bonne distance consiste donc à respecter la dignité de ceux et celles que l’on filme. Pour moi, s’il y a un geste de cinéma dans mon film, il réside tout entier dans cette distance.

Se faire oublier

Étant donné que vous aviez peu d’espace pour filmer, comment réussit-on alors à se faire oublier pour que les personnes filmées ne soient jamais perturbées par la présence de la caméra ?

KD : Là, c’est la base du travail du cinéaste, tout particulièrement lorsqu’on tourne un documentaire. Cela me fait repenser à ce documentariste – hélas mort trop jeune – qui s’appelle Renaud Victor : il avait réalisé un film à la prison des Baumettes [NDLR : "De jour comme de nuit", son dernier film, sorti en 1991], et à cette occasion, il parlait justement de cette distance, de la façon dont on travaille le lien avec son sujet. Il faut dire qu’il avait passé deux ans en immersion totale aux Baumettes, allant même jusqu’à s’enfermer dans une cellule avec des prisonniers. C’est vraiment un très grand film qu’il faut revoir.

Alors, bien sûr, il y a Wiseman, Philibert et plein d’autres qui font de grands documentaires. Mais ce rapport à l’oubli passe par l’acceptation. Il faut d’abord se faire accepter, et ensuite ne pas se cacher derrière un dispositif. J’ai d’ailleurs beaucoup de mal avec des mots comme « dispositif » et « concept ». Vous allez me dire qu’il y a toujours un dispositif quand on a une caméra, du son et tout le reste, mais j’estime que ces termes-là mettent hors jeu le cinéma. On les emploie trop, on n’a presque que ces mots-là à la bouche quand on parle de documentaire. J’ai fait donc le choix de partir sans dispositif et j’ai tout fait pour ne pas en avoir.

À un moment donné, on dirait qu’Ismaël s’adresse à vous lorsqu’il regarde la caméra…

KD : Oui, tout à fait, il s’adresse à moi. Ce n’est pas une impression, c’est authentique. La beauté du cinéma, c’est aussi de vous inviter à rentrer dans le regard du réalisateur pendant un temps donné. Et le regard, ce ne sont pas juste les yeux. C’est aussi l’âme, l’esprit, le mouvement. Et pendant un temps, vous allez donc être proche de moi.

Du contrôle de sa propre émotion

Comment contrôle-t-on son émotion lorsqu’on filme avec une caméra ?

KD : La première fois où je suis arrivé en réanimation, j’ai pleuré comme un bébé, et l’un des chefs de ce service m’a dit que c’était tout à fait normal. Même le plus haut responsable du service de réanimation m’a confié que, parfois, et même après plusieurs années d’expérience, il lui arrivait encore de s’enfermer dans son bureau pour pleurer. Autre exemple, qui correspond à un cas que je n’ai pas gardé dans le film : j’étais en train de filmer une maman dans une situation qui était plus que terrible, et je me suis soudain mis à exploser en sanglots. Ce n’était même plus possible pour moi de tenir la caméra, et c’est cette maman qui est venue me remonter le moral, en me disant que c’était normal de pleurer.

Lorsque j’ai repris la caméra, j’ai senti qu’il s’était produit quelque chose, que le fait d’avoir montré quelque chose de moi faisait que ces personnes ne me voyaient plus comme « le cinéaste qui se cache derrière sa caméra ». Je passais d’ailleurs beaucoup plus de temps à ne pas filmer qu’à filmer. Avec tous ces gens, je parlais beaucoup : de moi, de ma vie, de mes enfants, de mon travail. En outre, comme je voyais ces couples dépérir à force de ne rien manger, ma passion pour la cuisine m’a amené à cuisiner pour eux et cela a permis de créer du lien avec eux. L’idée, c’était : vous allez me donner des choses à l’image, et je ne vous trahirai pas. Filmer quelque chose à leur insu et qui ne leur plaise pas, c’était hors de question.

Quel a été l’après-tournage pour les deux couples ?

KD : Pour eux, l’« après-film », ça a surtout été l’« après-greffe ». Je ne dirais pas que le film n’a pas d’importance pour eux, mais je pense que ça n’est pas une priorité ni pour eux ni pour moi. Je crois que c’est le seul film que j’ai fait où la priorité n’était pas le film en soi. Je savais qu’à partir du moment où je décidais de poser la caméra sur ces deux couples pendant six mois d’affilée, j’avais trouvé le film. Je n’avais plus qu’à filmer ces deux couples, me concentrer sur eux. Et je savais que si par malheur l’un des deux enfants venait à décéder, j’arrêterais le film, même si les parents me donnaient l’autorisation de conserver ce que j’avais filmé. Et cela m’est arrivé : à un moment donné, j’ai filmé des parents qui finissaient par perdre leur enfant, et ils voulaient que cela reste présent dans le film, pour la mémoire de l’enfant. Mais c’était impossible pour moi. Même si l’on m’autorisait alors à continuer, je n’aurais pas accepté. Le film se serait arrêté. Je n’aurais pas eu la force de continuer.

Le choix du titre du film

Vous avez trouvé le titre dès le début ?

ES : Assez vite, je dirais.

KD : Cela me faisait penser à une renaissance. J’adore filmer les accouchements, j’adore tout ce qui se rattache à la maternité, et là, ça me semblait encore plus fort. Je voyais une famille avec un accouchement qui s’était mal passé, puis tout le monde qui se retrouve en service de réanimation, et enfin l’enfant qui renaît une seconde fois. C’est une vraie renaissance en soi.

Le titre suggère aussi moins un apprentissage qu’un réapprentissage de la paternité. Vous montrez en quoi la pratique de la paternité est une épreuve, pas seulement par la pression et le trop-plein auxquels on l’associe le plus souvent, mais aussi par l’attente, l’ennui, le doute et l’absence de repères…

KD : Oui, c’est pour cela que j’avais pensé à Renaud Victor. C’est un peu un film carcéral en soi : on est enfermé dans le service de réanimation, et c’est pourquoi on voit souvent le père debout devant la fenêtre qui regarde le monde extérieur comme s’il était un prisonnier dans sa cellule. Il y a même une scène où Julien dit « On ne peut pas sortir », et à son âge (à peine vingt-sept ans), on n’a pas envie de rester enfermé à l’hôpital. Tout n’est alors qu’attente. On attend que le bébé se réveille du sommeil artificiel, on attend que la crise passe, on attend l’organe, etc… D’ailleurs, j’ai constaté que les pères avaient semble-t-il plus envie d’être actifs, alors que les mamans se comportaient d’une autre façon. Peut-être que c’est ainsi que les choses se passent en général…

Et on voit aussi les clowns…

KD : Les clowns font un travail magnifique, que ce soit avec les parents ou les enfants. Je les salue car ils amènent tant de bonheur aux autres. Mais là, on parle de tout ce qui ne relève pas du médical. Durant la fabrication du film, j’ai découvert quelque chose de passionnant, car il y a des études qui sont faites là-dessus : il y a actuellement 25% de chances pour qu’un enfant soit guéri s’il est accompagné de ses parents. Et je parle là de présence quotidienne : les mots, les caresses, etc… C’est pour cela qu’il y a un médecin qui dit à un moment aux parents : « Votre boulot, c’est de le faire revenir à la vie ».

ES : C’est d’ailleurs une étude qui s’élargit maintenant à l’ensemble des patients. On découvre que des personnes âgées sont elles aussi concernées et que tout le monde, quelle que soit la pathologie concernée, a besoin d’être entouré lorsqu’il se trouve en contexte d’hospitalisation. Cela paraît évident quand on le dit, mais c’est pourtant quelque chose de nouveau pour le secteur médical. Cela fait cinq ans que les parents ont enfin la possibilité d’accéder aux chambres…

KD : Avant, la présence des parents en réanimation était interdite, c’était le médecin qui était « tout puissant ». Aujourd’hui, ils sont acceptés, mais comme il n’y a pas de place, ils sont obligés de dormir sur des fauteuils – ce qui est compliqué quand on s’installe ici pour six mois ! Il n’y a même pas de chambre de recueillement en cas de décès, il n’y a pas de douche, il n’y a pas de cuisine. La place du foyer, de tout ce qui n’est pas médical, n’a pas été pensée en ces lieux, alors que les médecins savent à quel point c’est fondamental.

L’introduction de la musique

Hormis quelques petites musiques enfantines, vous attendez longtemps avant de mettre une musique de film…

KD : Oui, mais c’est comme pour la fiction. Il y a déjà tellement d’émotions à l’écran, qu’est-ce qu’aurait fait la musique ? Personnellement, j’adore la musique, je l’aime même trop pour devoir l’utiliser comme un surlignage. C’est comme les rapports intimes entre les couples : à la fin, on voit Julien et Romane qui recommencent à avoir une intimité, mais pendant tout le reste du film, ils sont si concentrés sur leur enfant et leur travail d’accompagnement que, du coup, leurs corps n’existent plus, à tel point qu’ils en oublient même de se nourrir.

Du coup, qu’est-ce qu’aurait amené la musique ? De la joie artificielle ? De la tristesse artificielle ? Je ne pouvais la faire intervenir qu’à partir du moment où l’on est enfin sorti d’affaire et que tout peut redevenir normal. Je n’ai d’ailleurs pas mis n’importe quelle musique, car on a eu la chance d’avoir monsieur Vincent Peirani qui est juste le meilleur accordéoniste du monde – c’est un très grand musicien qui a d’ailleurs récemment participé à la bande originale de "Sans filtre" de Ruben Östlund. C’était un bonheur d’avoir cette musique, mais je ne pouvais pas la mettre n’importe où.

ES : [A Karim Dridi] Cela rejoint aussi le travail que tu as fait sur le son, avec ces respirations. L’accordéon amène du souffle, c’est comme une recherche d’air. Le film a besoin de cela, et pas d’une musique qui viendrait appuyer une émotion précise pour être sûr que le spectateur soit ému de cette manière-là… On amène de l’air par la musique, les paysages, les scènes d’humour…

KD : Trouver la bonne distance s’effectue aussi par le son. On est vraiment partis du réel pour musicaliser tout ce qui pouvait l’être : le bruit du respirateur, les « bip-bip » des machines, tout ce qui anime le service de réanimation… Cela dit, je pense qu’on ne perçoit pas tout cela comme étant de la musique…

Le choix de nous montrer la basilique Notre-Dame-de-la-Garde sous différents cieux ou couleurs était-il voulu ?

KD : J’adore ce lieu, mais cela a plus à voir avec mon côté mystique… Je dois signaler qu’il y avait une terrasse dans l’hôpital, où les soignants pouvaient fumer leur cigarette ou respirer un peu. J’étais un peu dans la même position qu’eux lorsque je m’y rendais, et à chaque fois, je voyais ces ciels marseillais absolument magnifiques dont je suis fan au quotidien – j’habite à Marseille. J’ai donc logiquement conçu ces plans comme des respirations au sein du film. Filmer Notre-Dame-de-la-Garde n’avait rien de religieux en soi.

ES : Il y a quand même le thème de la foi qui revient parfois…

KD : Oui, parce qu’Ismaël est le seul des quatre protagonistes qui soit croyant, et à un moment donné, il exprime sa croyance en tant que musulman.

ES : C’est aussi un film sur la force de l’amour dans une bataille, évidemment avec les parents en plein dedans, mais aussi sur les soignants et sur cet engagement qui est le leur. De la femme de ménage jusqu’au chirurgien le plus gradé, ils sont tous engagés, coûte que coûte, sensibles à ce soin constant dans l’humain. Et c’est ce qui fait qu’on a aujourd’hui d’excellents retours de soignants sur le film. Ce n’est pas un film sur eux, c’est un film pour eux, pour accrocher à l’essence même de leur engagement, pour leur dire à quel point on croit à ce qu’ils font. C’est clair qu’on ne choisit pas par hasard de travailler dans un hôpital, et encore plus dans un domaine comme l’hôpital public qui subit en ce moment une crise terrible.

Guillaume Gas Envoyer un message au rédacteur

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