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PAS DE VAGUES

Un cri et des remous

Julien, professeur de français se retrouve pris dans la tourmente au sein du collège où il enseigne, à cause de la lettre calomnieuse d’une de ses élèves qui l’accuse de harcèlement…

Troisième long métrage de Teddy Lussi-Modeste ("Le Prix du succès"), "Pas de vagues" s’intéresse à un sujet brûlant : le harcèlement. Non pas le harcèlement entre élèves comme il en existe hélas en milieu scolaire, mais celui dont est accusé à tort Julien, un prof de français, interprété par François Civil ("BAC Nord", "Les Trois Mousquetaires : D’Artagnan"). Cette histoire, bien que fictionnelle, puise ses racines dans un fait réel, puisque le réalisateur de "Pas de vagues" (qui enseigne par ailleurs en lycée) a été lui-même accusé à tort de harcèlement par une élève. De quoi donner une dimension plus personnelle à un film qui s’inscrit dans le mouvement de libération de la parole des professeurs face au sentiment d’abandon de leur hiérarchie.

"Pas de vagues" doit d’ailleurs son nom à la réponse apportée à Julien par la direction, quand il souhaite faire remonter les multiples menaces qu’il reçoit, amplifiées par la rumeur grandissante. Mais qu’est-ce qui peut justifier un tel acharnement ? Ce jeune professeur de français qui refuse de voir les élèves comme de simples étudiants de passage souhaite partager avec eux sa passion des lettres. Soucieux de créer du lien et de récompenser les bons élèves, il invite un groupe à manger au kebab du coin. Ce faisant, il franchit une ligne invisible, celle qui délimite la sphère publique de la sphère privée. Il crée ainsi des jalousies au sein de la classe tout en braquant involontairement les projecteurs sur lui. Une lettre d’accusation de harcèlement signée de la main d’une de ses élèves plus tard, le voilà pris dans un engrenage dont il est difficile de se défaire.

La distribution de ce film est remarquable et outre les rôles de François Civil, Shaïn Boumedine, Bakary Kebe et Toscane Duquesne, on peut saluer la performance des jeunes acteurs qui jouent les collégiens, donnant parfois à "Pas de vagues" des faux airs de documentaire. La mise en scène dispose le spectateur dans la même perspective que le professeur, qui s’investit beaucoup dans son travail, tout en cachant son homosexualité et sa relation avec son petit ami Walid (Shaïn Boumedine). Cette double narration est intéressante de prime abord, mais ralentit le rythme du film, ce qui est un peu regrettable car les séquences au collège (et particulièrement celles en classe) sont beaucoup plus immersives et prenantes que celles au sein du couple, somme toute assez banales.

Le film monte en pression malgré tout pour nous offrir un final percutant voire déroutant. D’aucuns crieront au génie alors que d’autres crieront à l’imposture. On pourra trouver que ce film a un certain goût d’inachevé, cependant le propos du métrage est avant tout d’exprimer une forme de révolte contre un système éducatif qui dessert les professeurs comme les élèves, laissant (trop) peu de libertés aux professeurs pour passionner leurs élèves, et moins encore de possibilités aux élèves de s’exprimer. En cela "Pas de vagues" est un manifeste.

Raphaël ConversEnvoyer un message au rédacteur

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