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MON LÉGIONNAIRE

Un film de Rachel Lang

Les stigmates de la guerre, au front et à la maison

Maxime et Vlad servent ensemble au sein de la Légion étrangère. Loin du front, leurs compagnes doivent gérer leur absence et continuer à vivre…

Mon légionnaire film movie

Il est toujours intéressant de voir une réalisatrice s’emparer du genre éminemment masculin du « film de guerre ». Si l’on pense évidemment à Kathryn Bigelow et ses œuvres multi-récompensées "Démineurs" et "Zero Dark Thirty", on peut aussi citer plus récemment Eva Husson ("Les Filles du Soleil"), Caroline Fourest ("Sœurs d’armes") ou encore Jasmila Zbanić et son travail sur le conflit bosnien ("Sarejevo, mon amour", "La Voix d’Aida"). Pour son deuxième long métrage après le très beau "Baden Baden", Rachel Lang a ainsi osé s’inscrire dans cette tradition. Rien d’étonnant pour celle qui est elle-même lieutenant réserviste dans l’armée. Probablement de par son expérience personnelle, la cinéaste a choisi de planter son récit dans un réalisme strict, refusant les artifices ou les études naturalistes. Ce qui l’intéresse, ce sont les faits, les silences, les détails anodins qui dessinent pourtant une histoire plus grande, brute et déchirante.

La caméra suit Maxime (Louis Garrel, définitivement l’un des acteurs les plus intéressants en ce moment), jeune bleu brillamment diplômé de l’Académie militaire. Pour sa carrière, il décide de rejoindre le second régiment de parachutistes de la Légion étrangère. Direction donc Calvi. Sauf que nous sommes loin des paysages de cartes postales, des cocktails sirotés au bord de la plage. Ici, tout est ordre et rigueur martiale. Plus que le destin de ces soldats français envoyés au Mali dans le cadre de l’opération Barkhane, c’est aux femmes que va s’intéresser Rachel Lang, celles qui restent en redoutant la moindre sonnerie de téléphone, celles qui s’occupent des enfants pendant que Papa risque sa vie, celles qui assument au quotidien tous les sacrifices d’une telle existence. C’est précisément cet univers que va découvrir Nika, simple conjointe d’un soldat (car dans cette vie de camp organisé, les épouses et les copines n’ont clairement pas les mêmes droits).

Si "Mon légionnaire" intéresse de par son regard quasi-documentaire, on peut regretter de ne pas retrouver l’audace et l’onirisme qui se dégageaient de la première réalisation de Rachel Lang. En résulte un drame efficace, embrassant parfaitement les relations conflictuelles entre les engagés et leurs compagnes. Mais il manque cette petite patte cinématographique qui viendrait susciter l’émotion et transcender ce portrait trop rarement saisissant. Même si ces quelques défauts et une certaine inertie scénaristique limitent l’ambition du film, il n’en reste pas moins une très belle lettre d’adieu pour Ina Marija Bartaité, fille du réalisateur Šarūnas Bartas et actrice principale, tragiquement fauchée à 25 ans dans un accident de voiture. Son visage juvénile illumine la pellicule et devrait habiter les souvenirs des cinéphiles pour encore de longues années.

Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur

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