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LE GANG DES BOIS DU TEMPLE

Lorsque rage rime avec poésie

Alors qu’il vient de perdre sa mère, Pons voit des connaissances du quartier se mettre dans une situation périlleuse…

Le Gang des bois du temple film movie

Plus de vingt ans après "Wesh Wesh, qu’est-ce qui se passe ?" tourné à l’arrache dans une cité de Montfermeil, Rabah Ameur-Zaïmeche retrouve la Seine-Saint-Denis en plongeant son intrigue au cœur d’un quartier voisin. Si cette banlieue porte un nom digne d’un conte pour gamins, Les Bois du Temple, le film sera bien plus sombre qu’une balade enfantine entre les tours. Dans cette histoire, on y trouve pourtant bien des personnages dignes d’une fable, avec ce Monsieur Pons, qui depuis les toits veille sur les autres, ce Prince qui va croiser la route des protagonistes, et cette bande d’hommes menés par Bébé dont le sobriquet ne témoigne pas de son âge, lui qui travaille pour subvenir aux besoins de sa famille. Sauf que lorsqu’on gratte un peu le vernis, on se rend compte que c’est bien les prémices d’un western urbain qu’est en train de poser le cinéaste. Car Monsieur Pons est un ancien militaire, le Prince, un émir saoudien bientôt braqué par le groupe d’amis épuisés de se contenter de petits coups.

Construit en trois parties, le métrage est avant tout un polar à l’ancienne, avec son héros taiseux et sa mise en scène épurée, nous rappelant par moments les classiques de Melville. Ici, il n’est pas question duser d’artifices pour choquer le spectateur, tout est brut, direct, sauvage. L’attaque du véhicule du cheik est saisie en quelques minutes, la caméra préférant se focaliser sur les conséquences, sur l’euphorie d’un pognon nouveau dont même les rêves d’utilisation restent terre-à-terre, rapidement balayée par un engrenage aussi violent que soudain. Si la trame narrative ne surprend guère, le réalisateur et scénariste réussit à nous emporter par la sincérité des êtres qui parcourent ce drame caméra à l’épaule, bien loin des clichés véhiculés par les chaînes d’informations en continu.

Dans ce microcosme où les figures paternelles de substitution sont souvent plus importantes que les originelles, c’est une vision du vivre ensemble qui s’esquisse en creux, celle où l’on peut jouer aux gangsters la journée et aider une dame âgée à porter son sac de courses le soir, où l’on ne juge pas l’autre, où l’on rigole au détour d’un tiercé raté avec les habitués du troquet. Sans misérabilisme ou sensationnalisme, "Le Gang des Bois du Temple" est une œuvre humaniste sur les conséquences d’un mauvais choix, dans un monde où tout n’est pas noir ou blanc. Après "Terminal Sud", Rabah Ameur-Zaïmeche confirme sa singularité dans le paysage cinématographique français.

Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur

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