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LA SYNDICALISTE

Un film de Jean-Paul Salomé

Isabelle Huppert saisissante, de victime en accusée

Maureen Kearney, syndicaliste CFDT chez Areva, est violemment agressée à son domicile, le 17 décembre 2012, et retrouvée en état de choc par son mari, un manche de couteau dans le sexe et un A tracé à la lame sur son ventre. Depuis quelque temps, voulant dénoncer les conséquences possibles sur les emplois d’un potentiel contrat entre EDF et la Chine, comprenant du transfert de technologie, elle subissait des pressions politiques et des menaces. Mais les enquêteurs ne trouvant pas traces des agresseurs, les soupçons se reportent alors sur elle, qui aurait pu manigancer son agression pour attirer l’attention sur cette affaire…

La Syndicaliste film movie

Deux ans après la trépidante comédie "La Daronne", où elle interprétait une traductrice des stups s'improvisant baronne de la drogue, Isabelle Huppert retrouve pour notre plus grand plaisir son réalisateur Jean Paul Salomé, pour cette fois-ci un thriller politique. Présenté pour la première fois au Festival de Venise, dans la section Orizzonti, "La Syndicaliste" est inspiré de faits réels, relatés dans le livre d’investigation de la journaliste Caroline Michel-Aguirre, responsable du service d’investigation de L’Obs, qui avait suivi l’affaire. Faisant ainsi le portrait de Maureen Kearney, déléguée de la CFDT chez Areva, violemment agressée à son domicile en 2012, c’est avant tout au processus de persécution de cette femme que s'intéresse le scénario adapté par Fadette Drouard et Jean-Paul Salomé.

Une histoire qui a tout pour générer un réel suspense et qui devrait avoir d’autant plus de retentissement en cet hiver où se questionne notre indépendance énergétique face à la flambée des coûts de production. Une situation actuelle d’ailleurs potentiellement liée au retard pris en matière de nucléaire civil, suite à la mise à mal du fleuron français qu’était Areva, dont le livre comme le film tentent justement de décortiquer les mécanismes. Car au travers d’une affaire de discrédit, de harcèlement psychologique et d’acharnement judiciaire, qui vise ce qu’on peut appeler une « lanceuse d’alerte », ce sont des enjeux économiques, des pressions politiques, des intimidations qui sont mises à jour, jusqu’à faire globalement froid dans le dos.

Maquillée et coiffée afin de ressembler à la vraie Maureen Kearney, Isabelle Huppert donne ainsi la réplique à Marina Foïs, en PDG d’Areva, plus ou moins complice selon les moments, à Yvan Attal, qui joue son successeur, décrit comme colérique, mais aussi à Christophe Paou, qui interprète le Ministre de l’Économie Arnaud Montebourg. N’hésitant nullement à nommer les différents acteurs autour de cette trouble affaire, le récit, sous une tension permanente, se divise entre l’avant et l’après agression. Évoqué par un coup de fil de la femme de ménage et quelques courtes scènes au début du métrage, le moment pivot que constitue justement l’agression, permet au spectateur d’entrer lui aussi dans une logique de doute, qui rajoute au sentiment d’injustice qui traverse le long métrage. Face au personnage joué par Isabelle Huppert, qui tente alors de prouver sa bonne foi, on se dit que l’actrice est une nouvelle fois impressionnante, dans le rôle d’une femme considérant elle-même qu’elle ne faisait pas une « bonne victime », du fait de sa force de caractère, et de son comportement réfléchi.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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